Hongrie : Viktor Orban, la dérive du dissident devenu Premier ministre
Héros de la lutte antisoviétique, Viktor Orban a peu à peu basculé dans un populisme et un autoritarisme effrénés. Il vient d’être reconduit haut la main dans ses fonctions de Premier ministre.
Les instances européennes n’ont pas fini de protester contre la dérive droitière de la Hongrie, ce pays qui fut membre du bloc soviétique jusqu’au tournant des années 1990 et rejoignit l’UE en 2004. Au terme d’une campagne électorale jugée "inéquitable" par les observateurs de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), l’autocrate Viktor Orban a en effet été reconduit haut la main, le 6 avril, dans ses fonctions de Premier ministre. Il va donc continuer de régner d’une main de fer sur toutes les institutions du pays. Allié aux chrétiens-démocrates, son parti conservateur, le Fidesz (Union civique hongroise), a obtenu 133 des 199 sièges au Parlement, devant une alliance de la gauche (38) et une formation d’extrême droite, le Jobbik (23).
Pour comprendre l’inaltérable popularité dont jouit cet homme marié à une juriste et père de cinq enfants, il faut remonter à la fin des années 1980, quand, à 25 ans, il fonde le Fidesz, qui est alors un mouvement de jeunesse. À sa tête, il s’illustre comme l’un des leaders de la lutte antisoviétique, réclamant lors d’un discours resté célèbre le départ des troupes russes déployées dans le pays. Fort d’un sens inné de la persuasion, il enchaîne ensuite les mandats au Parlement et, en 1998, devient Premier ministre. Il a 35 ans.
Un conservatisme de plus en plus débridé
Malgré un bilan économique positif (réduction de l’inflation et du déficit public), il perd son poste en 2002. Cet ancien footballeur, dont on dit qu’il n’aime rien tant que l’affrontement, devient le chef de file de l’opposition et glisse vers un conservatisme de plus en plus débridé. En 2010, il reprend la tête du gouvernement, mais, nouveauté capitale, dispose cette fois d’une majorité des deux tiers au Parlement. Ce qui lui permet, sans aucun débat, de faire adopter une nouvelle Constitution et 850 lois, pour la plupart antidémocratiques. Le Fidesz fait alors main basse sur la Hongrie, accapare tout, contrôle tout : institutions (notamment la justice), médias, banques… L’opposition et le mouvement associatif sont muselés, les acquis sociaux bradés.
Orban va jusqu’à réformer le système électoral pour redessiner les circonscriptions à son avantage. Une mise en coupe réglée que ni les manifestations de 2011 et 2012 (entre 50 000 et 100 000 personnes) ni les rappels à l’ordre de Bruxelles ne parviennent à enrayer. Une nouvelle fois plébiscité par les électeurs, séduits par sa politique de baisse des impôts et du prix de l’énergie, Viktor Orban a les mains libres pour poursuivre sa dérive nationaliste. Au mépris de toutes les règles européennes.
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