Présidentielle américaine : Hillary Clinton toujours d’attaque
Ex-First Lady, ex-secrétaire d’État et ex-rivale d’Obama, Hillary Clinton est loin d’avoir fait une croix sur la présidence. Son staff de campagne est déjà en place et piaffe d’impatience. Si tout va bien, elle deviendra en 2016 la première femme à diriger l’hyperpuissance planétaire.
Elle est partout. Même quand elle n’exerce aucune fonction officielle, Hillary Clinton (66 ans) sature l’espace public. Sa très probable candidature à la présidentielle de 2016 – elle devrait se déclarer l’année prochaine – est en train de virer à l’obsession. En janvier, elle a fait simultanément la couverture de Time et du New York Times. Dans les deux cas, la métaphore était la même : la "planète Hillary" autour de laquelle l’ensemble du système politique américain est censé graviter. Un mois plus tard, un énième livre a été publié sur le sujet. Son titre ? HRC, pour Hillary Rodham Clinton, comme il y eut naguère JFK. Seule entorse à cette clintonmania aiguë : l’annulation par NBC et CNN d’une minisérie et d’un documentaire consacrés aux époux Clinton. Les républicains ne supportaient pas l’idée que Hillary puisse être présentée sous un jour par trop favorable…
Il faut dire que sa popularité reste au zénith : 60 % des Américains ont d’elle une opinion favorable, contre 47 % pour le vice-président Joe Biden, qui devrait être son challengeur le plus sérieux lors de la primaire démocrate. Même le redoutable Robert Gates, qui fut le secrétaire à la Défense de G. W. Bush avant d’être celui de Barack Obama, l’épargne dans ses Mémoires publiés au début de l’année – alors qu’il étrille allègrement l’ensemble de l’establishment washingtonien.
Deux mots reviennent constamment pour décrire Hillary : compétence et loyauté. Malgré son affrontement très dur avec Obama lors de la primaire de 2008, elle fut une secrétaire d’État fidèle, qui s’abstint même d’informer son ancien président de mari de l’envoi d’un commando au Pakistan pour assassiner Oussama Ben Laden… Elle sera une candidate d’autant plus difficile à battre que sa machine de campagne tourne déjà à plein régime. Son comité de soutien, un super-PAC baptisé Ready for Hillary, est en place et s’apprête à collecter à son profit des millions de dollars auprès (notamment) des gros donateurs démocrates. Ceux qui ont fait le succès des deux campagnes d’Obama. Selon certaines estimations, le trésor de guerre de Mrs Clinton – qui, depuis qu’elle n’est plus secrétaire d’État, se fait payer 200 000 dollars pour chacun de ses discours – pourrait atteindre 1,7 milliard de dollars. Record absolu. Une équipe de choc a également été constituée afin de combattre les contrevérités qui pourraient être proférées sur son compte. En choisissant de lancer très tôt sa campagne de 2016, Hillary s’efforce semble-t-il de désamorcer les conflits d’ego qui avaient miné celle de 2008. Quant à Bill Clinton, il devrait jouer cette fois un rôle plus marginal, par crainte du caractère imprévisible de certaines de ses interventions.
Talon d’achille
Alors, Hillary a-t-elle déjà gagné ? Pas si sûr, car elle conserve des points faibles, notamment son passé de First Lady. La présidence de son mari reste un talon d’Achille sur lequel les républicains ne se font pas faute de tirer. Très probable candidat à la primaire républicaine, le sénateur Rand Paul a par exemple critiqué dans une récente interview le "comportement prédateur" de Bill Clinton à l’égard de Monica Lewinsky. Ce scandale vieux de plus de quinze années vient de refaire surface avec la publication par un site conservateur de la correspondance échangée entre Hillary et Diane Blair, l’une de ses amies proches décédée en 2000. Hillary y qualifie Lewinsky de "timbrée narcissique", mais souligne le caractère consensuel de sa relation avec Bill : non, ce dernier n’aurait à aucun moment mit à profit son statut de président pour parvenir à ses fins avec Lewinsky. Une révélation qui a déçu beaucoup de femmes enclines à voir en Hillary un exemple. La future candidate se qualifie d’ailleurs, à plusieurs reprises, de glass ceiling cracker : celle qui a brisé le plafond de verre. Cette correspondance montre aussi une First Lady complètement bunkerisée et se méfiant comme de la peste des journalistes : "beaucoup d’ego et pas de cervelle", dit-elle.
Une image confortée par la récente publication, dûment autorisée cette fois, de milliers de pages d’archives de la présidence Clinton. On y découvre une Hillary très impliquée dans la lutte politique, qui, en 1993, lutta de toutes ses forces, mais en vain, pour faire aboutir son projet de réforme de l’assurance santé. Ironie du sort, l’Obamacare, la réforme de ce même système de santé que l’actuel président a, lui, réussi à faire adopter – non sans mal ! – pourrait constituer un véritable boulet dans sa course à la présidence : une nette majorité d’Américains en a une opinion défavorable.
Si tout va bien, en 2016, Hillary clinton deviendra la première femme à diriger
l’hyperpuissance planétaire. © PAUL J. RICHARDS / AFP
opaque
L’attaque du consulat américain à Benghazi le 11 septembre 2012 – elle a endossé l’entière responsabilité de ce drame – devrait également donner du grain à moudre à ses adversaires. De même que son bilan en tant que secrétaire d’État, plutôt maigre comparé à celui de l’hyperactif John Kerry. Et puis, il est permis de s’interroger sur les raisons qui l’ont poussée à conserver Huma Abedin comme assistante personnelle. La jeune femme est mariée à Anthony Weiner, éphémère candidat à la mairie de New York. Or celui-ci avait l’étrange habitude d’envoyer des textos salaces à d’innombrables femmes à travers le pays !
Autre zone d’ombre, la santé financière de la Fondation Clinton – récemment rebaptisée Fondation Bill, Hillary and Chelsea Clinton. Celle-ci soutient de nombreux projets pour la défense des droits des femmes à travers le monde. Mais, selon le New York Times, l’opacité de son financement pose problème. Le déficit budgétaire qu’elle accuse depuis plusieurs années aussi. Si Hillary se présente à la présidentielle, on risque de voir éclore diverses accusations de conflit d’intérêt. Chelsea, la fille du couple, vient d’ailleurs d’être bombardée à sa tête pour déminer le terrain et remettre un peu d’ordre dans cette pétaudière.
Autre lièvre levé par le quotidien new-yorkais : les liens entre Hillary et Victor Pinchuk, magnat de l’acier ukrainien et, accessoirement, gros contributeur de la Fondation Clinton. Des liens plus qu’embarrassants depuis que les propriétaires de plusieurs aciéries en Ohio et en Pennsylvanie ont traîné Pinchuk devant les tribunaux américains pour concurrence déloyale. On peut rêver mieux pour séduire l’électorat ouvrier de ces deux swing States !
Et si, contre toute attente, Hillary décidait finalement de ne pas briguer la présidence ? D’abord, en raison de son âge : elle aura 69 ans en 2016. D’autre part, sa santé pourrait être meilleure : en décembre 2012, on lui a découvert un caillot de sang dans le cerveau, et cette alerte pourrait l’avoir fait réfléchir. D’ailleurs, elle évoque à longueur d’interviews le bonheur qu’elle éprouve désormais à "regarder des films stupides" avec Bill – qu’elle voyait très peu quand elle était secrétaire d’État ? Dans sa correspondance avec Diane Blair, elle ne cessait de se plaindre de sa vie à Washington, cette "ville folle". Alors, la question ne peut pas ne pas être posée : a-t-elle vraiment envie de revenir à la Maison Blanche ? Mais peu importe après tout son envie : on n’échappe pas à son destin. Surtout lorsqu’on s’appelle Hillary Rodham Clinton.
La nouvelle vie de Chelsea
Après s’être longtemps cherchée professionnellement – elle a fait du conseil financier avant de devenir journaliste sur la chaîne NBC -, Chelsea Clinton, 34 ans, a enfin trouvé sa voie : gardienne du temple familial. Il y a deux ans, elle a été nommée vice-présidente de la Fondation Clinton, qui porte désormais son prénom accolé à ceux de ses parents. Une arrivée qui a fait grincer quelques dents chez les vieux complices de Bill qui géraient jusqu’ici la fondation. C’est notamment le cas de Doug Band, qui est un peu comme un fils pour l’ancien président. Selon les mauvaises langues, c’est Band qui serait à l’origine des rumeurs insistantes sur les problèmes conjugaux de Chelsea et de son mari, Marc Mezvinsky. La jeune femme n’a pas attendu pour imprimer sa marque. Elle a diligenté un audit des finances de la fondation et veille sur l’héritage de son père. Elle s’est notamment beaucoup impliquée dans le tournage par Martin Scorsese d’un documentaire sur lui pour la chaîne HBO. Enfin, dans une interview pour Vogue en 2012, elle n’excluait pas de se présenter un jour à une élection. Que diable, on est une Clinton ou on ne l’est pas !
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