Burkina Faso : le russe Nordgold jette l’éponge à Taparko
Le producteur russe d’or invoque des « raisons de sécurité » pour justifier l’arrêt de ses activités à Taparko. La principale mine privée du pays est située dans le nord du Burkina, en proie à des violences djihadistes depuis 2015.
Les tensions semblent être arrivées à leur comble. Dans la soirée du 12 avril, la mine de Taparko, exploitée par le russe Nordgold, a annoncé dans une note d’information adressée au personnel, l’arrêt de ses activités pour « cas de force majeure ». Conséquence immédiate de cette décision : quelque 400 à 500 salariés, selon la direction du site aurifère situé à 200 km de la capitale dans le Namentenga, sont mis d’office au chômage technique. Des pourparlers doivent se tenir avec le ministère des Mines pour statuer sur leur sort.
Alors que Nordgold étudiait la possibilité d’investir plusieurs dizaines de milliards de F CFA pour développer une mine souterraine à Taparko, cette option se voit compromise par l’insécurité grandissante. « La situation sécuritaire au Burkina Faso se dégrade de jour en jour avec des conséquences négatives incalculables. Toute la zone autour de nos sites d’exploitation y compris la route Ouaga-Dori sont actuellement sous menace terroriste », précise le document signé par Alexandre Hagan Mensa, le directeur général de la Société des mines de Taparko (Somita).
Il ajoute : « Ces dernières semaines, l’accès au site est devenu pratiquement impossible. Cette situation met gravement en danger la vie du personnel sur les sites », d’après le responsable qui estime la société dans « une situation d’impossibilité absolue de poursuivre ses activités ».
Sécurisation des sites aurifères
Pour Rasmane Sawadogo, directeur De Nordgold au Burkina, « les sites de Bouroum, de Goengo et de Taparko sont régulièrement menacés par des hommes armés. Le personnel est stigmatisé et subit un fort niveau de stress lors des rotations. Au regard des risques élevés, la direction a donc décidé de préserver la sécurité des travailleurs en arrêtant les activités minières ». En effet, le 13 mars dernier, treize gendarmes ont péri dans une embuscade à Gorbalé près de Taparko, sur l’axe Kaya-Dori. La semaine suivante, vingt personnes trouvaient la mort dans l’attaque d’une mine d’or artisanale dans le nord du pays.
Pour faire face, certaines mines sont obligées d’héliporter leurs personnels sur site. Selon nos informations, le coût mensuel des rotations aériennes atteint près de 3 milliards de F CFA. Les groupes miniers actifs au Burkina Faso – Endeavour Mining, IamGold (Essakane), West African Resources ou encore Nordgold – en appellent au président de la transition, le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, pour que la sécurisation des sites aurifères et la relance de l’exploration minière soient des priorités.
« Depuis plusieurs années, nous n’avons plus d’investissements dans l’exploration minière. Le Burkina, qui était pourtant l’un des pays les plus dynamiques de la région dans ce domaine, est aujourd’hui relégué au second plan. C’est un chantier prioritaire pour les nouvelles autorités », estime un responsable d’une société minière. Le climat d’insécurité a provoqué le gel des budgets alloués à l’exploration et, à l’inverse, une hausse des dépenses de sécurité (estimée à entre +10% et +25 % depuis 2016).
Deux autres projets miniers au Burkina
Pour calmer les tensions qui pèsent sur le secteur aurifère, les autorités misent sur l’Office national de sécurisation des sites miniers (Onasim). Créé en 2018, l’organisme public contrôlé par le ministère des Mines, devait déployer quelque 3 000 policiers et gendarmes sur le terrain, la sécurité des sites faisant partie de ses prérogatives. Aujourd’hui, ils sont à peine 500 personnes.
Interrogé sur les répercussions des sanctions occidentales appliquées à la Russie en riposte à la guerre en Ukraine, Nordgold réfute tout lien avec la fermeture de la mine de Taparko.
La Société des mines de Taparko, propriété de la compagnie minière russe Nordgold , a été l’un des premiers sites à produire de l’or dans le pays, inaugurant l’ère du boom minier actuel avec près de 17 gisements aurifères actifs (soit 241 000 onces d’or). Outre Taparko, Nordgold exploite la mine de Samtenga, sur le plateau central, et celle de Sabcé (Bissa Gold), dans le centre-nord du pays, et est aussi présent en Guinée.
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