Japon – Yoshifumi Okamura : en Afrique, « c’est maintenant qu’il faut y aller ! »
De passage à Paris, l’ancien ambassadeur du Japon en Côte d’Ivoire – et désormais représentant personnel du Premier ministre pour l’Afrique-, Yoshifumi Okamura, évoque l’avancée des relations nippo-africaines.
Cette visite de Yoshifumi Okamura, directeur général pour les Affaires africaines au sein du ministère japonais des Affaires étrangères, a été l’occasion de faire le point sur la récente – et historique – tournée africaine du Premier ministre japonais, Shinzo Abbe, puis de revenir sur les engagements pris lors de la 5e Conférence internationale de Tokyo pour le développement de l’Afrique (Ticad V), qui s’est tenue en juin 2013. "Grâce à cet événement, notamment, l’Afrique est aujourd’hui à la mode au Japon, lance-t-il d’emblée. Et je répète à qui veut l’entendre que c’est maintenant qu’il faut y aller !"
Homme d’expérience, souriant, le diplomate, qui s’exprime dans un français parfait, connaît bien le continent. Après avoir travaillé en Algérie au début de sa carrière, il devient ambassadeur du Japon en France (2002-2005), puis en Côte d’Ivoire entre 2008 et 2011. Là, il est propulsé en première ligne de la crise postélectorale d’avril 2011. Sa résidence, presque mitoyenne de celle de l’ex-président, est attaquée par des "mercenaires". Il faut l’intervention de la force française Licorne, appuyée par des hélicoptères, pour exfiltrer l’ambassadeur nippon et ses collaborateurs. Les images de cette spectaculaire opération feront alors la une des médias du monde entier.
Et il se souvient de ces événements dans les moindres détails. Il se rappelle aussi ses dernières conversations avec Laurent Gbagbo, qu’il dit avoir "tenté de raisonner, pour qu’il puisse sortir de cet épisode par le haut".
"Au sein du corps diplomatique, nous pensions que cette crise n’allait pas durer longtemps. Nous étions comme tous les Ivoiriens, bloqués chez nous. Nous avons attendu, un jour, puis deux, puis trois… confie-t-il. Et, petit à petit, cette si jolie ville d’Abidjan s’est transformée en un Beyrouth des années 1980. De mon fauteuil, je voyais les événements, la bataille, les soldats, les mercenaires…"
Mais l’ancien ambassadeur préfère tourner cette page et entend désormais se consacrer à l’avenir des relations entre l’Afrique et le Japon. Présent aux côtés de Shinzo Abe, en janvier, lors de ses différentes visites officielles en Côte d’Ivoire, au Mozambique et en Éthiopie, Yoshifumi Okamura assure que celui-ci a été "très impressionné par le sens des responsabilités des leaders africains, qui ont tous tenu à parler en priorité d’avenir, de potentiel de développement et de la croissance plutôt que de programmes d’assistance humanitaire…" Même effet d’agréable surprise chez la plupart des dirigeants d’entreprise qui faisaient partie de la délégation et qui n’avaient jamais mis les pieds en Afrique. Un continent à l’encontre duquel ils nourrissaient de nombreux préjugés : "Ils ont vu qu’il y avait des grands hôtels, des buildings modernes, et même des voitures japonaises, plaisante-t-il. Ils ont compris que l’Afrique avait changé." Sur place, plusieurs accords d’affaires ont d’ailleurs été signés.
Lors du Ticad V, l’archipel a promis 24 milliards d’euros d’aide publique et d’investissements privés pour soutenir la croissance africaine sur cinq ans, dans les domaines des infrastructures, des ressources humaines, de l’agriculture, de la santé, de l’éducation, de la paix et de la stabilité. Pour le moment, les critères de sélection des projets restent encore flous, même si les autorités japonaises chercheront à concilier soutien aux pays jouissant d’une stabilité et d’une bonne gouvernance et besoins du pays, notamment en ressources naturelles et en énergie. "Les Japonais n’arrivent pas en Afrique pour exploiter les ressources, faire du profit et s’en aller, précise cependant le diplomate. Ils viennent aussi pour partager leur savoir-faire dans de nombreux domaines et mettre en place de réels partenariats gagnant-gagnant. C’est cela la mentalité japonaise."
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