Mali : Moussa Diawara, le « mauvais génie » de Bamako
Sous la présidence d’Ibrahim Boubacar Keïta, le patron de la redoutée Sécurité d’État était l’un des hommes les plus puissants du pays. Désormais sous les verrous, il est toujours aussi craint.
En cette matinée du 18 août 2020, l’heure est grave au domicile familial des Keïta, à Sébénikoro. Et pour cause : depuis la nuit, les nouvelles en provenance du camp militaire de Kati sont préoccupantes. Des soldats s’y sont mutinés et en ont pris le contrôle. Le coup d’État que tout le monde redoutait ces dernières semaines à Bamako semble, cette fois, bien enclenché. Les tenants du régime tentent de trouver une parade. Autour d’Ibrahim Boubacar Keïta pour cette réunion de crise : son fils Karim, son Premier ministre, Boubou Cissé, et le patron de la Direction générale de la sécurité d’État, Moussa Diawara.
À la mi-journée, ce général influent, dont tous connaissent l’entregent au sein de l’armée, glisse au président qu’il va sortir pour essayer de désamorcer la crise. Soucieux de rester le plus discret possible, il embarque sur un deux-roues et disparaît dans l’agitation bamakoise.
Vers 16h30, les forces spéciales du colonel Assimi Goïta déboulent chez le chef de l’État, l’arrêtent et l’embarquent à Kati. Dans la rue, la foule en liesse applaudit. C’en est terminé d’un pouvoir à bout de souffle, dont beaucoup de Maliens n’attendaient que la chute. Entre-temps, Moussa Diawara n’est jamais revenu.
Très vite, l’attitude du militaire durant cette journée cruciale suscite des questions. Comment le chef de la puissante Sécurité d’État (SE), dont beaucoup connaissent la silhouette à Bamako, a-t-il pu prendre la fuite sans être inquiété alors que la résidence présidentielle était déjà encerclée ? Était-il dans le coup ? A-t-il trahi son patron de toujours ? Un an et demi après le putsch, le flou reste tel qu’au sein de certaines chancelleries internationales on continue à s’interroger sur le rôle exact de Diawara durant ces quelques heures où tout a basculé.
Une étrange disparition
Cette image de Brutus, plusieurs sources dans l’entourage d’IBK se refusent à y croire. « Moussa a toujours été d’une loyauté sans faille envers lui, affirme un de ses intimes. Le coup d’État était irréversible. Il savait que la partie était perdue. Il a donc essayé de gérer la situation comme il le pouvait et de trouver un terrain d’entente avec les putschistes pour que la dignité du président soit préservée. » « Il n’a pas trahi IBK, renchérit un membre des renseignements. C’est surtout par son incompétence que ce coup est arrivé. Il n’a pas su l’anticiper, ni l’empêcher. Et une fois que c’était fait, il a d’abord agi pour sauver ses propres intérêts. »
« Moussa », comme l’appelait IBK, avait une place toute particulière dans son cœur
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