Côte d’Ivoire : après la primature, Patrick Achi à la vice-présidence ?

Alors que le Premier ministre vient de démissionner, les spéculations vont bon train sur son avenir et sur les contours du futur gouvernement ivoirien. Le politologue Geoffroy Julien Kouao analyse les enjeux de ce remaniement.

Patrick Achi au palais présidentiel, à Abidjan, le 10 juillet 2018.

Aïssatou Diallo.

Publié le 15 avril 2022 Lecture : 3 minutes.

Le Premier ministre Patrick Achi a annoncé ce mercredi 13 avril sa démission ainsi que celle de son gouvernement, après plusieurs mois de suspense entretenu par le président Alassane Ouattara. Nommé Premier ministre il y a un an, ce technocrate a su imprimer sa marque dans un contexte de pandémie et de crise sécuritaire. Cet ex-cadre du PDCI a également su trouver sa place au sein du parti présidentiel et dans le premier cercle du président.

En attendant l’annonce la semaine prochaine d’un gouvernement plus resserré voulu par le président ivoirien, Geoffroy Julien Kouao, politologue et auteur de l’essai Côte d’Ivoire : une démocratie sans démocrates. La ploutocratie n’est pas la démocratie, revient sur les enjeux de ce remaniement.

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Jeune Afrique : Pourquoi Alassane Ouattara procède-t-il à un remaniement maintenant ?

Geoffroy Julien Kouao : Dans son discours prononcé au moment où le Premier ministre a remis sa démission, Alassane Ouattara a dit vouloir que l’action gouvernementale soit plus efficace sur les volets sociaux et sécuritaires. Pour y parvenir, il lui faut certainement une nouvelle équipe gouvernementale.

Par ailleurs, il est possible que le président veuille pourvoir le poste de vice-président resté vacant après le départ de Daniel Kablan Duncan il y a deux ans. On peut penser qu’il souhaite nommer Patrick Achi à cette fonction.

Ce remaniement ne serait pas un signe de défiance envers Patrick Achi ? 

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Je ne pense pas que ce soit le cas. Alassane Ouattara est en train de s’organiser dans la perspective de la présidentielle de 2025 pour laquelle Henri Konan Bédié du PDCI-RDA et Laurent Gbagbo du PPA-CI montrent déjà des velléités de candidature.

Concernant Patrick Achi, s’il est effectivement nommé vice-président, il deviendra la deuxième personnalité de l’État et sera vu comme le dauphin du président ivoirien. Le vice-président remplace le président de la République en cas de vacance du pouvoir et peut se voir déléguer un certain nombre de prérogatives. Lorsqu’on regarde la Constitution ivoirienne, le Premier ministre n’a qu’un simple pouvoir administratif qui consiste à animer et coordonner l’action gouvernementale. Si Patrick Achi parvenait à être nommé vice-président, il gagnerait en grade politique.

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En le désignant comme deuxième personnalité de l’État, le président ferait aussi de la géopolitique, en contrant Laurent Gbagbo dans le sud-est du pays. D’autre part, cela permettrait de nommer une nouvelle personnalité à la primature, qui pourrait lui succéder aussi en cas de besoin.

On parle de lui à la vice-présidence mais Patrick Achi ne pourrait-il pas être tout simplement reconduit comme Premier ministre ?

Il peut l’être mais dans la pratique politique ivoirienne, cette hypothèse est peu plausible. Dans l’usage, lorsqu’un Premier ministre qui démissionne est reconduit, il l’est immédiatement. Là, ça n’a pas été le cas.

Quel pourrait être le profil du nouveau chef du gouvernement ivoirien ?

Il y a deux hypothèses. Si Alassane Ouattara veut un technocrate, il va certainement penser à trois personnalités : le secrétaire général de la présidence, Abdourahmane Cissé (qui a succédé à Patrick Achi en mars 2021), son directeur de cabinet, Fidèle Sarassoro ou encore la ministre du Plan et du Développement, Kaba Nialé. Il pourrait même faire appel à monsieur Jean Claude Kassi Brou, actuel président de la Commission de la Cedeao.

S’il veut donner une touche plus politique au gouvernement, il pourrait plutôt nommer un homme politique. Dans ce cas, il pensera à des cadres du RHDP comme Gilbert Kafana Koné, Adama Bictogo ou encore Kandia Camara.

Tout cela se fait dans la perspective des élections locales de 2023 et présidentielle de 2025. Le président essaie de choisir les meilleurs chevaux sur lesquels son parti et lui-même peuvent miser pour ces consultations locales et générales.

Le président doit s’adresser au congrès le 19 avril. Doit-on s’attendre à une annonce sur la nomination du futur vice-président ?

Souvenez-vous que c’est devant l’Assemblée nationale, lorsque nous n’avions qu’une seule chambre, que le président avait annoncé officiellement aux députés et à la nation la nomination de Daniel Kablan Duncan au poste de vice-président de la République. En réunissant le congrès, c’est-à-dire l’Assemblée nationale et le Sénat, à Yamoussoukro le mardi 19 avril pour se prononcer sur l’état de la nation, c’est l’occasion idéale pour le président de nommer le vice-président en accord avec le parlement, comme le stipule la constitution. C’est donc une hypothèse très plausible.

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