Sénégal : l’ambassade de Turquie à Dakar, le mur de trop
À Dakar, défigurée par la frénésie immobilière, la construction de la future ambassade de Turquie sur le front de mer provoque une vive indignation.
C’est un modeste mur qui fait parler tout Dakar. Soumise à une frénésie immobilière sans limites, la capitale sénégalaise a vu progressivement l’ouest de son front de mer défiguré par les hôtels, les résidences de luxe et le centre commercial Sea Plazza. Aussi, lorsque l’information s’est répandue qu’un nouveau mur était en construction, celui de l’enceinte de la future ambassade de Turquie, les réactions d’hostilité se sont multipliées, dans la rue et sur les réseaux sociaux.
"Nous comptons porter plainte contre l’État pour abus de pouvoir", explique l’architecte Pierre Goudiaby Atepa, président d’honneur de l’association SOS Littoral. Selon l’association, il y a contradiction entre certains textes affirmant le caractère "inaliénable et imprescriptible" du domaine public maritime, ce qui exclut leur appropriation privée, et le recours abusif des autorités à un article dérogatoire du code du domaine de l’État. Ce dernier stipule que les propriétés du domaine public peuvent, dans certains cas, être déclassées.
La municipalité serait opposée au projet d’ambassade
La cession du terrain à l’ambassade de Turquie a été accordée par l’ancien président Abdoulaye Wade. Son successeur, Macky Sall, tout comme le maire de Dakar, le socialiste Khalifa Sall (dont le parti est membre de la coalition gouvernementale), doit aujourd’hui gérer la grogne provoquée par le "mur de la honte".
À la mairie, on affirme être opposé au projet d’ambassade tout en s’abstenant d’afficher une position trop tranchée face à cet imbroglio juridique où s’enchevêtrent prérogatives de l’État et des collectivités territoriales. "Nous avons mis en place un cadre de concertation avec le ministère de l’Intérieur pour trouver une solution au problème", a fait savoir Khalifa Sall, tout en incitant les conseillers municipaux à calmer le jeu. "À chaque fois que nous avons intenté une action pour préserver le littoral dakarois, la mairie était à nos côtés", rappelle Pierre Goudiaby Atepa. Selon l’architecte, mobilisé de longue date sur ces questions, si rien n’est fait, "un jour viendra où l’on pourra rallier le centre-ville depuis l’aéroport sans même voir l’océan".
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