Burkina Faso : quel avenir pour le groupe Oumarou Kanazoé ?
Deux ans après la disparition de son fondateur, la compagnie Oumarou Kanazoé, pionnière dans le secteur de la construction au Burkina Faso, a perdu de son lustre d’antan. Mais elle s’accroche.
À Ouaga 2000, le quartier chic et moderne de la capitale burkinabè, la question hante les esprits. Pourquoi, deux ans après le décès du patriarche Oumarou Kanazoé, les travaux de la mosquée financée par sa société n’ont-ils toujours pas repris ? Sur le site, les matériaux n’ont pas quitté leurs emballages : près de 3 milliards de F CFA (4,6 millions d’euros) de marbre et de luminaires attendent. Du côté de la famille, c’est le silence radio sur ce chantier figé, symbole d’un groupe qui ne s’est pas totalement remis du décès de son emblématique fondateur.
Baisse de régime
Mady Kanazoé, longtemps numéro deux, a repris l’entreprise familiale fondée par son père en 1973. Discret, voire méfiant vis-à-vis des médias, il a repoussé toutes les demandes d’entretien de Jeune Afrique. « OK détient toujours des marchés consistants, mais depuis la mort de Kanazoé père elle subit une baisse de régime », reconnaît Sita Tarnagda, journaliste et biographe de l’entrepreneur. Le chiffre d’affaires d’OK était même en baisse avant sa disparition, Oumarou Kanazoé ayant souffert d’une longue maladie. De 28,4 milliards de F CFA (42,5 millions d’euros) en 2010, il était passé à 23,2 milliards en 2011 (33 millions d’euros). Et en 2012, la baisse avait été plus radicale encore, avec une chute à 5,6 milliards de F CFA (8,5 millions d’euros).
Certes, OK a remporté des marchés importants : la gestion concédée des péages sur les nationales 1 et 4 pour une dizaine de millions d’euros, la construction de la route Sabou-Koudougou pour 42 millions de dollars (30,9 millions d’euros)… Mais depuis la disparition de son créateur, la société n’a pas gagné de marchés phares, ni au Burkina ni à l’étranger. L’influence du groupe a diminué : Mady ne figure ni dans les instances dirigeantes du patronat ni dans celles de la Chambre de commerce et d’industrie (CCI). Et la proximité d’Oumarou Kanazoé avec Alizéta Ouédraogo, désormais présidente de la CCI, semble en partie oubliée.
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Partition en solo
Si OK paraît tourner au ralenti, la galaxie Kanazoé, avec sa myriade de sociétés détenues par différents membres de la famille – mais sans liens capitalistiques entre elles -, a perduré. « Nous sommes 25 enfants, chacun a son entreprise », explique Aissata Kanazoé, qui, décorée chevalier de l’ordre du Mérite lors de la fête nationale du Burkina Faso, le 11 décembre, a décroché ce jour-là plusieurs marchés pour la réalisation d’infrastructures routières.
« Mady s’occupe d’OK, et nous, nous gérons nos propres affaires », insiste Djibril, un autre frère. « Oumarou Kanazoé a mis le pied à l’étrier à ses enfants, et très peu sont restés dans la compagnie d’origine », ajoute un proche de la famille. « Quand le patriarche est décédé, tout le monde craignait qu’ils se déchirent. Mais ils n’ont pas eu besoin de vivre à la remorque de la société familiale », complète Jean-Paul Giudicelli, directeur général d’Africa Motors, l’une des propriétés de Djibril, qui a su diversifier ses activités. À la tête de Groupe Kanazoé, il est bien entendu actif dans le BTP (Kanazoé Frères), mais aussi dans la distribution automobile (Africa Motors) et dans l’immobilier (Kanazoé Développement). Misant également sur une stratégie sous-régionale, le holding réalise un chiffre d’affaires d’environ 25 milliards de F CFA. De quoi en faire la première des entreprises de la galaxie Kanazoé.
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