Maroc : Aït Manos, quand le zellige s’africanise
La maison qui fête ses 30 ans habille les intérieurs luxueux, de Marrakech à New York. Elle présente sa collection Africa.
Jaune, corail, violet, noir et blanc, voilà les couleurs peu communes qui émaillent les carreaux de losange du zellige “wax Africa”. Une création inédite signée Aït Manos, maison de fabrication de mosaïques mêlant depuis 30 ans traditions arabo-andalouses et modernité. Puisant directement son savoir-faire dans le patrimoine de Fès, berceau des métiers d’art du Maroc, cette “tribu des mains” dévoile une collection inspirée des textiles caractéristiques de l’Afrique de l’Ouest, du wax au plus traditionnel kenté du Ghana ou de Côte d’Ivoire, mais aussi des paysages naturels de la Guinée équatoriale ou de la mer d’Émeraude de Madagascar. Le moyen pour ses fondateurs, Ghalia Sebti, ex-salariée dans l’export et la finance, et son mari, Tawfik Bennani, céramiste de formation, de faire fusionner les deux Afrique grâce à un art de l’assemblage qu’ils doivent à la maîtrise de leurs soixante-dix artisans zelligeurs, à pied d’œuvre dans leur atelier de Casablanca.
Diébédo Francis Kéré, l’inspirateur
Aux côtés des traditionnelles rosaces, fleurs, étoiles et autres formes géométriques, la maison ose les motifs rectilignes, les cœurs, et l’association de trois à six émaux, là où la ville de Fès s’appuie traditionnellement sur une palette de douze couleurs.
« On s’est inspiré des réalisations de l’architecte burkinabè Diébédo Francis Kéré, prix Pritzker 2022, et, plus largement, de la colorimétrie des différents pays représentés », souligne Ghalia Sebti. Celle-ci a confié à ses architectes de prestigieuses réalisations : le bassin du Musée Yves-Saint-Laurent et la piscine du Royal Mansour, à Marrakech ; la mosquée Um Bandar, à Jeddah ; le restaurant rose poudré Willmott’s Ghost à Seattle (États-Unis) ; l’aéroport de Malabo, en Guinée équatoriale.
Clientèle internationale
C’est notamment grâce à la mise en place d’un système de pré-assemblage en dalles conçu en 1997, qu’Aït Manos a pu ouvrir le marché du zellige à l’export, en direction des États-Unis ou des pays du Golfe. « Autrefois, l’Arabie saoudite faisait venir les artisans marocains sur place », confie Ghalia qui se félicite de pouvoir proposer à une clientèle internationale ses pierres de terracotta taillées, émaillées et assemblées à la main. « On s’adapte à l’environnement de nos clients. On proposera du noir et blanc à New York. Au Texas, on pariera sur la couleur. Idem pour Marseille, où la mosaïque se voudra beaucoup plus chamarrée, avec des touches de jaune et de vert, comme à Fès », explique-t-elle.
Un art haut de gamme qui a un coût : entre 3 800 et 7 000 dirhams (entre 350 et 650 euros) le mètre carré. Des prix justifiés par un savoir-faire artisanal, que la patronne compte faire perdurer en recrutant de jeunes pousses, qui côtoieront des maîtres plus anciens. Leurs luxueuses pierres sont labellisées “Zellige de Fès”, une certification mise au point par le ministère marocain du Tourisme et de l’Artisanat, et ont acquis le marquage CE au terme de nombreux tests. « Nous sommes très fiers d’avoir obtenu ce label européen, qui nous permet de travailler partout dans le monde. La logistique et l’acheminement se développent sur le continent, et on a donc bon espoir de livrer [notre production] en Afrique subsaharienne à l’avenir grâce au développement du fret aérien. »
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