Inondations en Afrique du Sud : un apartheid climatique ?

Après les dévastations meurtrières consécutives à de fortes pluies, voici venue l’heure des comptes pour les dirigeants sud-africains. Cinglants, les mots employés surgissent d’une autre époque.

© Damien Glez

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Publié le 22 avril 2022 Lecture : 2 minutes.

« On ne peut pas parler de catastrophe naturelle », s’insurgent, catégoriques, des observateurs de la société sud-africaine actuelle, après le décès d’au moins 448 personnes dans la région de Durban touchée par les intempéries les plus dévastatrices de l’histoire du pays, tant en pertes humaines qu’en dommages matériels. Dans une Afrique où il pleut trop peu – à l’Est – ou trop – au Sud – il ne suffit plus de hausser les épaules en invoquant les voies impénétrables d’un grand Horloger, ni même les responsabilités des nations les plus industrialisées dans le réchauffement climatique.

Un nouvel apartheid

Alors que le président sud-africain a déclaré l’état de catastrophe nationale, des citoyens le qualifient de médecin qui arrive après la mort et dénoncent l’imprévoyance des élus, la multiplication des bidonvilles, la mauvaise gouvernance notamment la corruption des autorités locales – et, au final, les inégalités entre communautés – la majorité zouloue du KwaZulu-Natal paie le plus lourd tribut de la tragédie récente.

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Qu’aurait pu faire le pouvoir politique face aux vannes du ciel ? Essentiellement mener une politique agricole susceptible d’enrayer l’exode rural qui enfante les habitats individuels précaires et traquer les fraudes et le racket qui handicapent l’érection rapide d’infrastructures résistantes aux catastrophes naturelles.

Ces dernières semaines, 12 000 maisons ont été endommagées ou totalement réduites à néant. Des routes et des ponts ont été détruits, entraînant notamment la paralysie du port de Durban qui dessert plusieurs pays d’Afrique australe…

12 000 maisons ont été endommagées ou totalement réduites à néant

Et voici que ressurgit un terme de triste mémoire sud-africaine : apartheid. Un apartheid climatique qui ne relève plus d’une idéologie institutionnalisée mais qui isole pourtant, peu ou prou, les mêmes populations « de couleur ».

Début mars, bien avant les intempéries, un rapport de la Banque mondiale indiquait que l’Afrique du Sud était le pays le plus inégalitaire au monde, que 10 % de la population possédait plus de 80 % des richesses et que la « race » était un facteur déterminant dans l’organisation de la société.

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Fragilités

Le désaveu est particulièrement cinglant pour un régime toujours enfanté par le Congrès national africain (ANC) dont Nelson Mandela fut le leader emblématique. Un parti qui a fêté ses 110 ans, en janvier, qui a fourni cinq présidents noirs successifs mais qui pourrait perdre sa majorité aux élections générales de 2024.

Révélatrice des fragilités de la nation arc-en-ciel, la tragédie des récentes inondations exacerbe la lassitude des populations, après neuf années de présidence d’un Jacob Zuma aujourd’hui en procès et les quatre ans de présidence d’un Cyril Ramaphosa qui semble en être resté aux déclarations d’intention, après des années contestées de lutte contre la Covid-19.

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