Barack Obama : « Quand j’étais un jeune Noir en colère… »
Barack Obama s’aventure rarement sur le terrain miné des relations raciales. Il a fait une exception lors du récent lancement de l’opération My Brother’s Keeper. Décryptage.
D’ordinaire pudique, Barack Obama a surpris en évoquant en termes émouvants son passé de jeune homme noir lors du lancement, le 26 février à la Maison Blanche, de l’initiative My Brother’s Keeper ("le gardien de mon frère"). Doté de 200 millions de dollars, ce programme sur cinq ans vise à aider les jeunes Noirs, ces laissés-pour-compte du rêve américain. Illettrisme, absentéisme scolaire, démêlés avec la justice… Ils cumulent en effet les handicaps. La raison essentielle ? L’absence de père.
"Je n’avais pas de père à la maison et cela me mettait en colère, même si je ne m’en rendais pas compte, a reconnu Obama devant un parterre de jeunes Blacks médusés par sa franchise. J’ai fait des mauvais choix, je me suis drogué, je n’ai pas toujours été sérieux à l’école et je me trouvais des excuses." L’idée de cette initiative lui est venue après la mort de Trayvon Martin, cet adolescent noir tué en Floride par un vigile hispanique. L’acquittement de ce dernier, en juillet 2013, provoqua une vague de protestation à travers tout le pays et incita le président à sortir de sa réserve : "Si j’avais eu un fils, il aurait ressemblé à Trayvon…" Le lancement de My Brother’s Keeper coïncide avec le deuxième anniversaire du drame.
Outre les problèmes affectifs (selon une enquête, 76 % des pères blancs montreraient tous les jours de l’affection à leurs enfants, contre 56 % des pères noirs), Obama a aussi évoqué la "lassitude" de l’Amérique concernant la condition des jeunes Noirs. Celle-ci, s’est-il insurgé, passe pour "consubstantielle au mode de vie américain", raison pour laquelle elle est "la toile de fond de nombreux films", alors qu’elle devrait "nous briser le coeur et nous pousser à agir". Mais le président a exhorté les jeunes Noirs à ne s’en prendre qu’à eux-mêmes pour les conséquences des mauvais choix qu’ils peuvent être amenés à faire.
Une corde autour du cou de la statue de James Meredith
Pas un mot, en revanche, sur les tensions ethniques qui viennent de secouer certaines universités américaines. Ainsi, le 16 février, sur un campus du Mississippi, des jeunes Blancs ont passé une corde autour du cou de la statue de James Meredith, premier étudiant noir à s’y être inscrit, en 1962. À l’époque, il n’avait pu faire son entrée dans l’établissement que sous la protection de la police… Alors, oui, c’est entendu : il faut davantage aider les jeunes Noirs. Mais ne faut-il pas aussi éduquer davantage les jeunes Blancs ?
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