Chine : de l’air, svp !
Dans la capitale chinoise et ailleurs, la pollution atmosphérique atteint des niveaux sans précédent.
La plupart des Pékinois commencent leur journée par un coup d’oeil sur leur téléphone portable. Pour s’informer du niveau de la pollution. En ce lundi 3 mars, il est de 280, ce que le compte Twitter de l’ambassade américaine – qui, la première, s’est livrée à ce genre de mesure – juge "très mauvais". Depuis le début de l’année, il n’est presque jamais passé sous la barre des 100, niveau qualifié de "modéré" en Chine, mais qui, en Europe, déclencherait immédiatement une alerte rouge ! Le maximum recommandé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) est en effet de 25. Ces chiffres mesurent la concentration dans l’air de particules (dites PM2.5) si fines qu’elles s’infiltrent dans les poumons et provoquent des cancers.
Masques et purificateurs d’air : la panoplie du Pékinois moyen
Deng Xuan est un nostalgique de la pureté de l’air. "Si la pollution dépasse 300, dit-il, je ne sors pas. Mon fils, lui, n’a pas le choix, puisque son école se fiche complètement de la pollution, mais je lui interdis de faire du sport et de sortir après les cours. Depuis la fin du Nouvel An chinois, nous avons même acheté des masques pour mieux nous protéger." De fait, masques et purificateurs d’air font désormais partie de la panoplie du Pékinois moyen. Mais la capitale n’est pas la seule à vivre dans le brouillard : 15 % du territoire sont actuellement frappés par une vague de pollution sans précédent. Il s’agit surtout des provinces du Nord, où des centrales à charbon vétustes, polluantes, mais qui produisent 80 % de l’électricité consommée dans le pays, tournent à plein régime. "Nous payons trois décennies de folle croissance", commente Li Bo, membre d’une petite ONG de protection de l’environnement.
Fermetures d’usines, circulation alternée ou développement des énergies vertes, les mesures annoncées périodiquement ne sont pas à la hauteur de cette "airpocalypse". Les dernières en date laissent songeur quant à la capacité du gouvernement à régler rapidement le problème. Lorsque la pollution a atteint le niveau orange, il a en effet entrepris de fermer 300 usines autour de Pékin. Peine perdue, le niveau a encore monté. Ma Jun, l’un des plus célèbres défenseurs de l’environnement, tient une base de données concernant les industries les plus polluantes : raffineries, aciéries, centrales thermiques, constructeurs automobiles… Et il s’appuie sur des chiffres officiels pour mettre la pression sur les industriels.
En ce mois de mars, le ciel de la capitale est en permanence lourd et gris. Les yeux rivés sur leurs smartphones, les 20 millions de Pékinois observent l’évolution des taux de fines particules dans l’atmosphère et s’impatientent. Et ce n’est pas la visite impromptue du président Xi Jinping dans les vieux quartiers qui va leur mettre du baume au coeur. "Nos dirigeants ont des purificateurs d’air et sont à l’abri de la pollution, qu’ils ne nous fassent pas croire qu’ils partagent nos problèmes", s’insurge une habitante.
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