Turquie : qui veut la peau d’Erdogan ?

Le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, qui demande à son fils de cacher des millions de dollars. C’est ce que révèlent des conversations téléphoniques mises en ligne par un mystérieux informateur…

Manifestation contre le gouvernement, à Istanbul, le 26 février. © OZAN KOSE/AFP

Manifestation contre le gouvernement, à Istanbul, le 26 février. © OZAN KOSE/AFP

Publié le 6 mars 2014 Lecture : 2 minutes.

À un mois d’un scrutin municipal à valeur de test après une année 2013 marquée par un mouvement de contestation d’ampleur nationale ("Gezi Park"), le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, est cette fois directement mis en cause dans le scandale de corruption qui, depuis décembre 2013, éclabousse le parti AKP (islamiste, au pouvoir). L’accusation vient d’une source anonyme sur YouTube qui a divulgué, les 24 et 26 février, deux enregistrements de conversations téléphoniques entre Erdogan et Bilal, l’un de ses deux fils.

Le premier est daté du 17 décembre 2013, le jour où la police a lancé des perquisitions contre trois fils de ministres et des hommes d’affaires proches de l’AKP. Les échanges accréditent les soupçons qui pesaient sur Erdogan. Papa, d’une voix glaciale : "Quoi que tu aies dans la maison, tu t’en débarrasses. Préviens ton frère, ta soeur, ton oncle…" Bilal, pas très bien réveillé : "Il y a de l’argent dans ton coffre. C’est ça ?" Quelques heures plus tard, tandis que les télévisions se font l’écho du coup de filet, Bilal vient au rapport : "On a presque fini. Mais il reste 30 millions d’euros [à dissimuler sur le milliard de dollars – 730 millions d’euros – qui aurait été réparti entre cinq maisons]."

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Dans un second enregistrement, Erdogan dit à son fils de refuser un pot-de-vin de 10 millions de dollars d’un businessman et de faire monter les enchères…

Une féroce censure d’internet

Aucune source indépendante n’a pu vérifier l’authenticité des enregistrements. Comme à son habitude, le Premier ministre crie à la machination. Pourtant, deux responsables chargés de la sécurité des communications officielles et de s’assurer de l’inviolabilité des "cryptophones" utilisés par Erdogan ont été limogés. Depuis des mois, les sympathisants de l’AKP accusent la confrérie religieuse Gülen de fomenter un complot contre Erdogan, en cheville avec des puissances étrangères (entendez : les États-Unis) et grâce à ses puissants relais dans la police et la justice turques.

Furieux de voir sa candidature à la présidentielle d’août ainsi compromise, Erdogan a fait voter deux lois très controversées : l’une instaure une féroce censure d’internet, l’autre renforce la mainmise du pouvoir sur l’institution judiciaire. Le 28 février, un tribunal a remis en liberté cinq des suspects (dont deux fils de ministres).

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La veille, le Premier ministre avait apostrophé Fethullah Gülen, exilé aux États-Unis depuis quinze ans, le mettant au défi de revenir en Turquie et d’entrer en politique. Sachant que l’imam se défend de toute ambition en ce domaine et préfère exercer son influence dans l’ombre, cet appel a peu de chances d’être entendu. Mais les "fuites" sur YouTube pourraient ne pas s’arrêter là…

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