Espagne : Cristina, l’infante aux doigts percés

Cristina dépense sans compter. Normal, elle est la fille du roi d’Espagne. Mais la justice a quand même peu apprécié qu’elle fasse régler ses factures personnelles par une société créée par son peu scrupuleux mari !

La princesse Cristina de Borbón y Grecia à la sortie du tribunal le 8 février. © LLUIS GENE/AFP

La princesse Cristina de Borbón y Grecia à la sortie du tribunal le 8 février. © LLUIS GENE/AFP

Publié le 26 février 2014 Lecture : 3 minutes.

"La justice est la même pour tous", avait déclaré le roi Juan Carlos lors de son discours de Noël, en 2011. Iñaki Urdangarin, son gendre, venait alors d’être mis en examen. Il était accusé d’avoir détourné 6 millions d’euros que les autorités régionales des Baléares et de Valence avaient versés à l’institut Noos, qu’il présidait, afin d’organiser des événements sportifs. Son épouse, l’infante Cristina, pourtant épargnée au début de l’affaire, a fini par être rattrapée par la justice, conformément à la règle édictée par son père.

Malgré l’opposition du parquet, le juge José Castro, du tribunal de Palma de Majorque, aux Baléares, s’est résolu à l’inculper. Au terme de neuf mois d’enquête portant sur la période 2002-2012 pendant lesquels il a passé au crible factures, déclarations et documents portant la signature de l’infante, il a rédigé un rapport de plus de 200 pages. Arrivée confiante au tribunal, le 8 février, Cristina a joué les naïves pendant les cinq longues heures qu’a duré l’audition. Surtout, elle est restée fort évasive dans ses réponses aux questions dont le magistrat l’a assaillie – 431, au total ! En gros, elle ne sait rien, ne se souvient de rien et n’a qu’un seul tort : avoir fait confiance à son mari. "L’infante est habituée à ne s’occuper de rien, à avoir tout ce qu’elle veut sans se soucier des dépenses, plaide José Apezarena, journaliste et spécialiste de la famille royale. Elle savait que son mari avait une société et qu’il allait travailler. Pourquoi lui aurait-elle posé des questions ?"

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Cette absence de communication est peu crédible, tant le couple paraît uni. Quand Urdangarin a été mis en examen, l’infante a tenu à être à ses côtés malgré les réticences de sa famille. Quand elle a été à son tour mise en cause, elle a écouté le roi et a feint de prendre ses distances avec son mari. En août 2013, la fondation La Caixa, pour laquelle elle travaille depuis 1992, lui a offert un poste à Genève. Elle s’est donc installée avec ses quatre enfants sur les rives du lac Léman, tandis qu’Iñaki restait officiellement à Barcelone. Dans les faits, il se rend régulièrement en Suisse.

Les dépenses personnelles du couple sont reglées par Aizoon

Mais le juge Castro est un homme obstiné. Soupçonnant l’existence d’une fraude fiscale et d’opérations de blanchiment, il s’est intéressé à la société Aizoon, une filiale de Noos créée par Urdangarin (celui-ci détient 50 % de son capital, à égalité avec son épouse). Et, de fait, il est apparu que les dépenses personnelles du couple (voyages, restaurants, cours particuliers, etc.) étaient réglées par Aizoon afin d’être déduites des impôts. Tel a également été le cas des travaux de rénovation (coût : 3 millions d’euros) entrepris dans la résidence du couple à Barcelone, un petit palais situé dans le quartier chic de Pedralbes. Cette luxueuse demeure, dont le juge Castro a ordonné la saisie au cours de l’été 2013, a été achetée 6 millions d’euros grâce notamment à un prêt de 1,2 million d’euros consenti par le roi à sa fille. "J’ai remboursé 150 000 euros à mon père", s’est défendue cette dernière lors de son audition. Alors, trop dépensière, l’infante ? "Ses achats sont peut-être excessifs, mais ils ne constituent pas un délit pénal", estime Apezarena.

Reste que la comptabilité d’Aizoon montre que Cristina a embauché des domestiques en situation irrégulière, payés au noir et déclarés comme prestataires de la société, dont le siège se trouvait… au domicile du couple. Elle jure qu’elle ignorait que leurs salaires étaient débités du compte d’Aizoon et précise que c’est le secrétaire de son mari qui s’est occupé de leurs contrats de travail.

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Le 8 février, le procureur a mis en cause la responsabilité civile – et non pénale – de l’infante. Une amende de 600 000 euros a été requise contre elle. Mais l’accusation de fraude fiscale a été abandonnée.

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