Centrafrique : Ngaïssona, l’homme qui se voulait « roi » des anti-balaka
Cible numéro 1 des autorités centrafricaines, Pierre-Édouard Ngaissona court toujours. L’ex-ministre de Bozizé s’est autoproclamé « coordinateur politique » des milices anti-balaka.
Mis à jour le 05/03 à 11h55
Si la situation à Bangui n’est toujours pas stabilisée, Ngaïssona, 46 ans, n’y est sans doute pas étranger. "Coordinateur politique" autoproclamé des anti-balaka, le président de la Fédération centrafricaine de football (FCF) a vu dans la montée en puissance de ces milices d’autodéfense l’occasion de se repositionner sur l’échiquier politique.
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Comme tous ceux qui ont prétendu être derrière ce mouvement sans véritable chef, Ngaïssona n’en contrôle qu’une petite partie. Une faction "bien équipée, composée notamment d’officiers des Forces armées centrafricaines et d’ex-membres de la garde présidentielle, opérant principalement à Boy-Rabe [quartier de Bangui réputé favorable à l’ancien président François Bozizé]", précise une source sécuritaire française, pour qui il ne fait aucun doute que Ngaïssona reçoit ses ordres de la famille de Bozizé.
Il faut dire que l’homme s’est forgé une réputation sulfureuse. En 2002, alors qu’il est agent des Eaux et Forêts, il est visé par l’opération mains propres lancée par le Premier ministre, Martin Ziguélé, et accusé de nombreuses malversations financières. Après un détour par la case prison, Ngaïssona revient aux affaires à la faveur du coup d’État de Bozizé en mars 2003. Ambitieux, "il raflait tous les marchés de l’État", selon un politicien.
Prêt à tout
Bombardé ministre de la Jeunesse et des Sports du gouvernement d’union nationale en février 2013, Ngaïssona aurait participé, peu avant le putsch de la Séléka, à la radicalisation des esprits, distribuant des armes aux membres de la Coalition citoyenne contre les rébellions armées (Cocora), pro-Bozizé.
Difficile de dater ses premiers contacts avec les anti-balaka. Toujours est-il qu’il quitte le Cameroun – où il s’était réfugié – pour Bangui peu après la chute de Michel Djotodia, le 10 janvier. Il revient avec la ferme intention de profiter du nouveau rapport de force défavorable à la Séléka. L’ancien ministre tente d’intégrer le gouvernement puis d’y placer des membres de sa famille. En vain. Estimant que l’équipe d’André Nzapayeké n’est pas représentative, il reprend son entreprise de déstabilisation et devient l’une des cibles prioritaires des nouvelles autorités.
Ngaïssona, qui bénéficie de quelques soutiens importants, a pu échapper à l’opération menée le 15 février par l’armée française et la Misca ayant conduit à l’arrestation de plusieurs chefs anti-balaka. Le 25 février, la Misca croit enfin annoncer sa capture… Avant de faire son mea culpa quelques jours plus tard : "Après recoupement des informations reçues, il s’avère que la personne arrêtée réponde plutôt du nom de Eugène Barret Ngaïkossé, ancien capitaine des Forces armées centrafricaines (FACA) et membre du groupe anti-balaka, avec son frère Claude Ngaïkossé. La similitude des patronymes est à l’origine de cette méprise que la MISCA regrette", peut-on lire dans un communiqué daté du 1er mars.
Ngaïssona, lui, court toujours.
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Par Vincent Duhem
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