Centrafrique et Mali : Wagner et la Russie dans le viseur de Human Rights Watch
Après avoir pointé la responsabilité de combattants étrangers dans la mort de quelque 300 civils au Mali, l’ONG accuse des mercenaires russes de meurtres et de tortures en Centrafrique. Mais certains préfèrent parler de harcèlement de l’Occident envers le pays de Vladimir Poutine.
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 4 mai 2022 Lecture : 2 minutes.
Publié ce mardi 3 mai, le nouveau rapport de l’ONG internationale Human Rights Watch concerne des faits qui se seraient déroulés en Centrafrique entre février 2019 et novembre 2021. Il y est question d’abus aussi graves que massifs sur des civils : détentions, agressions, tortures, meurtres et peut-être même des crimes de guerre. Dont l’exécution sommaire d’au moins une dizaine de personnes, le 28 juillet 2021, au nord de la ville de Bossangoa, en plein jour. Des victimes qui n’étaient pas armées…
Les auteurs ? Human Rights Watch évoque « des forces liées à la Russie », parlant russe, circulant avec des véhicules russes et portant des tenues de soldats russes. Si les activités officielles de ces présumés paramilitaires restent encore floues, l’origine géographique ne fait pour elle pas de doute. Droit dans ses bottes, le président centrafricain Faustin-Archange Touadéra a toujours reconnu avoir fait appel à Moscou, fin 2020, lorsqu’une énième offensive rebelle menaçait Bangui.
Stoïque, la Russie admet que des « instructeurs militaires » mais « non armés » sont présents en Centrafrique. Le portrait-robot dressé par l’ONG laisse plutôt deviner des mercenaires du groupe paramilitaire Wagner, ceux-là même dont le Kremlin a l’habitude de nier l’existence.
Jaloux, voire russophobe ?
En avril, Human Rights Watch accusait déjà des « combattants étrangers » avec le même profil d’avoir contribué à l’exécution sommaire de quelque 300 civils à Moura, dans le centre du Mali. Lorsque de telles accusations ne suscitent pas le mutisme absolu des autorités russes et africaines concernées, elles alimentent une guerre de communication dans laquelle l’Occident apparaît comme jaloux, voire russophobe. Les médias – par exemple RFI et France 24, suspendus au Mali – et les ONG occidentales – dont Reporters sans frontières (RSF), qui vient d’annoncer le « déblocage » et la remise en ligne des sites de ces deux organes de presse audiovisuelle – sont présentés comme les affidés de puissances jugées néocoloniales.
Quand l’ONU, l’Union européenne et la France accusent régulièrement les « mercenaires » de Wagner de commettre des crimes en échange d’un pillage organisé de certaines ressources africaines, certains y voient un harcèlement contre la Russie. Avec deux arguments : primo, « l’ami » Vladimir Poutine a toujours tenté de mettre au pas les ONG étrangères dans son pays. Secundo, l’un des ancêtres de Human Rights Watch, Helsinki Watch, fut fondé en 1978 dans le but de surveiller… l’Union soviétique. Dans un XXIe siècle des « vérités alternatives », les conclusions sont vite tirées. Mais les rapports de l’ONG ne prétendent s’adresser ni aux autorités russes, ni aux régimes maliens ou centrafricains.
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