Guinée : massacre du 28 septembre, l’enquête se poursuit

Plus de quatre ans après le massacre du stade de Conakry, l’enquête se poursuit. Trop lentement selon les familles des victimes. Mais la procédure pourrait s’accélérer.

Un manifestant interpellé par les forces de l’ordre au stade de Conakry, le 28 septembre 2009. © SEYLLOU / AFP

Un manifestant interpellé par les forces de l’ordre au stade de Conakry, le 28 septembre 2009. © SEYLLOU / AFP

Publié le 10 mars 2014 Lecture : 3 minutes.

À Conakry, ils sont nombreux à espérer que la fin de la transition politique, marquée par l’installation du Parlement, permettra de se pencher sur l’état du troisième pouvoir et des dossiers sensibles dont il a la charge. Des espoirs renforcés par la nomination, lors du remaniement de janvier, d’un nouveau ministre de la Justice, Cheick Sako, un avocat franco-guinéen inscrit au barreau de Montpellier (France). Parmi ces dossiers, celui du massacre perpétré à Conakry le 28 septembre 2009 – et les trois jours qui suivirent – par les forces de sécurité guinéennes.

>> Lire aussi : Massacre du 28 septembre 2009, quatre ans après, où en est l’enquête ?

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C’était il y a quatre ans. Malgré l’interdiction prononcée la veille par le président autoproclamé Moussa Dadis Camara, 35 000 Guinéens s’étaient réunis dans le plus grand stade de la capitale pour manifester pacifiquement, à l’appel de l’opposition, contre la candidature du chef de la junte à la présidentielle. Ils furent rapidement rejoints par une centaine de soldats et de gendarmes qui ouvrirent le feu. Bilan : 157 morts, des dizaines de femmes violées et mutilées, des centaines de blessés.

C’était il y a quatre ans. Et malgré l’ouverture d’une instruction en février 2010, aucun des responsables du massacre n’est passé devant un tribunal. "Ce qui manque, c’est une volonté politique forte et durable de remettre la justice au premier plan et d’apporter un véritable soutien aux trois magistrats chargés de l’enquête pour qu’ils se sentent entièrement libres d’inculper ou d’entendre qui ils veulent", explique Antonin Rabecq, représentant de la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH) en Guinée.

D’autres dénoncent une trop forte dépendance à l’agenda politique : "Avant les législatives, les juges d’instruction ont interrompu leurs travaux pendant plusieurs mois, raconte le membre d’une ONG. Par ailleurs, ils sont censés travailler exclusivement sur cette affaire mais, en réalité, ils jonglent entre plusieurs dossiers." Si tous s’accordent à dire que les conditions de travail des magistrats se sont largement améliorées depuis le début de l’instruction, les moyens humains et financiers s’avèrent toujours insuffisants.

Moussa Dadis Camara coule des jours heureux à Ouagadougou

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Pour le moment, plus de 400 victimes ont été entendues et 8 militaires, dont 7 hauts gradés, ont été inculpés. Derniers en date : un gendarme accusé de viol (avril 2013) et le capitaine Claude Pivi, chef de la sécurité présidentielle depuis 2008 (juin 2013). "C’est un bilan en demi-teinte pour le moment, regrette Antonin Rabecq. Des figures influentes de l’ex-junte sont épinglées, mais la plupart restent introuvables, en liberté ou pis sont maintenues dans leurs fonctions comme Pivi. En outre, si les victimes entendues sont nombreuses, les témoins le sont beaucoup moins. Ils sont pourtant essentiels pour les contre-interrogatoires, les confrontations, etc."

Quant à Moussa Dadis Camara, il coule des jours heureux à Ouagadougou, au Burkina. Ni lui ni les membres de son cercle le plus proche n’ont été entendus. Deux commissions rogatoires internationales ont pourtant été émises pour qu’il soit interrogé par des magistrats burkinabè. En vain. Selon des sources bien informées, il serait pourtant prêt à leur répondre désormais…

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"Maintenant que le pays semble retrouver une certaine sérénité politique et institutionnelle, j’espère vivement que ce dossier va avancer rapidement et qu’un procès va se tenir. La Guinée ne pourra et ne doit pas y échapper", assène Khalifa Gassama Diaby, le ministre des Droits de l’homme. "Après de tels crimes, ajoute-t-il, on ne peut s’en sortir à bon compte. Les Guinéens ont droit à la vérité et les coupables doivent être punis conformément à la loi pour que le pays en finisse enfin avec la culture de l’impunité. Et que cela ne se reproduise plus."

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