Centrafrique : Michel Djotodia, cool à Cotonou… Mais jusqu’à quand ?
Exilé au Bénin, l’ex-président centrafricain, Michel Djotodia, s’est bien adapté à sa nouvelle vie et joue les gentlemen-farmers. Mais la Cour pénale internationale pourrait mettre fin à cette paisible retraite…
Une maison blanche, ordinaire, coincée entre l’école primaire et l’antenne-relais, à Ayène, un quartier situé à la sortie nord de Cotonou. C’est ici, derrière de hauts murs, que vivent Michel Djotodia, l’ancien président centrafricain de la transition, sa famille et quelques proches. Ils sont arrivés les uns après les autres pour entamer un exil imposé par l’éviction de l’ex-chef de la Séléka du pouvoir, le 10 janvier. Dans la maison, des agents de renseignements et deux gardes du corps béninois assurent leur sécurité.
Visiblement, Djotodia a tourné la page et repris une vie normale. Entre ses cinq prières quotidiennes, l’ancien leader de la rébellion reçoit. Parmi ses visiteurs réguliers, Octave Houdégbé, le fondateur de l’université béninoise privée North American University, et Dah Kakanakou, un chaman brièvement chargé de mission à la présidence à Bangui… L’ex-président ouvre aussi ses portes aux étudiants centrafricains venus solliciter sa générosité pour régler leurs droits d’inscription ou une ordonnance médicale. "Il nous reçoit, nous prodigue des conseils. Il aide volontiers", affirme Dimanche Noël, l’un de ces étudiants inscrit à l’université publique de Calavi, au Bénin.
Selon ses voisins, l’homme ne s’embarrasse pas de "protocole" et arrive "sans crier gare" pour bavarder. "Il est revenu à la vie civile sans difficulté. Il est très aimable. On peut même dire que c’est l’un des nôtres", raconte, admiratif, Éric Minavoa, un habitant du quartier.
Il se consacre à ses deux passions : sa ferme et sa nouvelle maison.
Le reste du temps, il se consacre à ses deux passions : sa ferme, située à 70 km au nord de Cotonou, près de Toffo, et sa nouvelle maison, en construction dans la cité d’Arconville, à Calavi, un quartier de la capitale. Lancés timidement lorsqu’il dirigeait la transition, les travaux se sont accélérés depuis son installation au Bénin. L’ancien chef de l’État s’y rend presque chaque après-midi et y reste de longs moments.
Petite fortune…
Entièrement libre de ses déplacements, Djotodia aime se faire conduire à la ferme à l’arrière de son 4×4 Infiniti noir le week-end. Des membres de sa famille ou quelques confidents viennent lui tenir compagnie. De retour en ville, il lui arrive de passer en début de semaine au maquis La Congolaise, dans la banlieue est de Cotonou, un bar prisé des ressortissants d’Afrique centrale.
Si le Bénin lui a offert l’hospitalité, l’ex-président doit subvenir lui-même à ses besoins. Ce qui ne lui pose guère de problème. Pendant la rébellion, il a amassé une petite fortune personnelle grâce à de généreux "mécènes" du Golfe puis il s’est enrichi, durant sa brève présidence, dans le commerce de pierres précieuses. De quoi s’assurer des jours tranquilles, à lui-même ainsi qu’aux vingt-quatre membres de son entourage.
Reste que son sommeil pourrait se voir troubler : le 7 février, la Cour pénale internationale (CPI) a ouvert un examen préliminaire sur les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité commis en Centrafrique depuis septembre 2012. Affaire à suivre…
Chantal, éphémère première dame
L’ex-première dame de Centrafrique est béninoise. Chantal Djotodia, née Vinadou Tohouégnon, 32 ans, était à la fois la trésorière et la conseillère la plus influente de son époux. Cette ex-infirmière a rencontré Michel Djotodia en 2008 : elle était visiteuse de prison, et lui, détenu à Cotonou. Elle en devient l’épouse en juin 2012. Ancienne présidente de la fondation La Renaissance, c’est elle qui a mené la transaction immobilière de la maison où vit le couple à présent. Elle aussi qui a organisé le déménagement à Cotonou. Anticipant la chute du régime de la Séléka, elle y avait pris ses quartiers trois semaines avant son mari. En revanche, elle semble vivre plus difficilement son départ du pouvoir que ce dernier. Elle prenait très au sérieux ses fonctions de première dame, et y avait pris goût.
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