Mali : les illusions perdues de Karim Keïta

Il était l’un des hommes les plus puissants mais aussi les plus conspués du Mali d’Ibrahim Boubacar Keïta. Lui qui rêvait d’un destin présidentiel a été contraint à l’exil après la chute de son père. Mais à 43 ans, il ne compte pas en rester là.

Karim Keïta à l’aéroport de Sénou, à Bamako, le 11 juillet 2018 © Nicolas Réméné

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Publié le 31 mai 2022 Lecture : 10 minutes.

En cette matinée du 21 janvier 2022, le cœur n’est guère à la fête dans la capitale malienne. Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) est sur le point d’être inhumé. Quelques jours plus tôt, le président qui avait dirigé le pays pendant près de sept ans avant d’être renversé par cinq colonels putschistes en août 2020 a perdu son dernier combat. Au crépuscule du 16 janvier, une crise cardiaque l’a emporté à son domicile de Sébénikoro.

Dans l’enceinte du camp du génie militaire de Bamako, où les putschistes ont accepté d’organiser des funérailles nationales, l’émotion est palpable. Ils sont plus de 2 000 à être présents. L’ancienne première dame, Aminata Maïga, qui a soutenu son mari jusqu’à son dernier souffle, est au premier rang, ainsi que son unique fille, issue d’une autre union.

Parmi les garçons du président, seul le benjamin, Boubacar, a pu être présent. Assigné à résidence au lendemain du coup d’État, « Bouba » a recouvré la liberté début février 2021, grâce à l’entremise du président guinéen Alpha Condé. C’est à lui, le discret, qu’il revient de rétablir l’honneur d’IBK, si souvent terni ces derniers mois. « Je ne peux m’empêcher de faire une comparaison avec Socrate qui, sous le coup des sycophantes, fut condamné à mort en buvant la ciguë. Papa, cette ciguë, tu l’auras bue jusqu’à la lie, lance-t-il, amer. Devant les lamentations de sa femme, qui trouvait la condamnation injuste, Socrate lui répondit : “On peut me tuer, mais on ne peut me nuire.” Ainsi plus rien ne peut t’atteindre désormais. »  

Karim doit vivre l’enterrement de son père de loin, ce qui lui est insupportable

Bouba vit désormais à Abidjan, tout comme le plus connu, jadis le plus influent, et le plus décrié des fils Keïta, Karim. Celui-ci savait son père rongé par un cancer qui laissait entrevoir peu d’espoir de guérison. Mais on n’est jamais réellement préparé à pareille mort. Le fils doit pourtant ce jour-là vivre l’enterrement de son père de loin, ce qui lui est insupportable.

Mandat d’arrêt international ?

Car depuis le 5 juillet 2021, le « fils préféré » du président fait l’objet de poursuites judiciaires au Mali. Le doyen des juges d’instruction du tribunal de la commune IV de Bamako, Sidi Abdine Maïga, a affirmé détenir des « preuves accablantes » contre lui et a décidé de relancer l’affaire Birama Touré. Karim Keïta est accusé d’être à l’origine de la séquestration du jeune journaliste du journal Le Sphinx. Au moment de sa disparition, ce dernier enquêtait sur une liaison présumée entre Karim Keïta et la femme de l’un de ses amis, ainsi que sur des contrats d’armement qui n’avaient pas été honorés. 

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