Espagne : les travailleurs immigrés peu effrayés par la crise
La crise ? Quelle crise ? Une récente étude en témoigne : les travailleurs immigrés sont majoritairement satisfaits de leurs conditions d’accueil et n’envisagent pas d’aller voir ailleurs.
Ils vivent depuis longtemps en Espagne, y sont relativement bien intégrés mais sont frappés de plein fouet par la crise économique. Il n’empêche : six immigrés sur dix se disent satisfaits de leur pays d’accueil et n’envisagent pas d’aller voir ailleurs. C’est le résultat d’une étude (Clés de l’intégration des immigrés en Espagne en 2013) publiée le 10 décembre par la Fondation marianiste pour l’éducation et le développement. Elle est l’oeuvre de trois sociologues, Antonio Gutiérrez Resa, Pedro González Blasco (décédé en janvier 2013) et Ileana Ligia Mihaila. "Nous avons voulu donner la parole aux immigrés, qui sont moins bien payés, moins qualifiés et plus fréquemment au chômage que les Espagnols [36 %, contre 26,6 %]", explique le premier. De fait, plus de la moitié d’entre eux considèrent que leurs conditions de travail sont bien plus dures que celles des autochtones. Alors, pourquoi vouloir rester coûte que coûte ?
"L’étude montre que les immigrés apprécient en premier lieu la qualité des systèmes éducatif et sanitaire espagnols, explique Gutiérrez Resa. Par ailleurs, la corruption en Roumanie ou au Maroc atteint des niveaux effrayants, et le chômage y est bien plus élevé que ne le disent les chiffres officiels." La plupart sont arrivés il y a plus de six ans. Ceux qui comptent rentrer un jour dans leur pays d’origine avec leurs économies sont principalement des Roumains, qui constituent la communauté étrangère la plus importante (19 %) devant les Marocains (18,8 %), les Équatoriens (9,4 %) et les Subsahariens (6,3 %). Selon l’Institut national de la statistique (INE), en janvier 2012, l’Espagne comptait 5,7 millions d’immigrés. Soit 12 % de la population.
Ce sont les Maghrébins (36,9 %) et les Subsahariens (13,8 %) qui ont le plus de mal à s’intégrer et qui sont les premiers touchés par le chômage. Plus de 55 % des Marocains sont ainsi sans emploi. La grande majorité d’entre eux travaillait dans le bâtiment, l’un des secteurs économiques les plus durement frappés – avec l’hôtellerie et le commerce – par l’éclatement de la bulle immobilière, il y a cinq ans.
Autre obstacle à l’intégration : le poids des langues régionales – outre le castillan, quatre sont officiellement reconnues : le catalan, le basque, le galicien et l’aranais. Certes, la majorité des immigrés vit dans la région de Madrid, mais il y en a aussi beaucoup dans celle de Barcelone, en proie à une forte poussée indépendantiste. Il va de soi que la nécessité d’apprendre le catalan, en plus de l’espagnol, constitue un facteur discriminant. Et puis, pour trouver du travail, un Marocain ou un Algérien sera toujours handicapé par rapport à un Sud-Américain, dont l’espagnol est la langue maternelle. Pourtant, 68 % des immigrés se déclarent favorables à l’apprentissage des langues européennes…
Un choc culturel et religieux
De même, à la différence des Latinos et des Roumains, presque tous catholiques ou orthodoxes, les Maghrébins et la plupart des Subsahariens sont de confession musulmane. Pour eux, le choc culturel et religieux à leur arrivée en Espagne est plus brutal. "Le cas des Algériens est un peu différent, nuance Antonio Gutiérrez Resa. Ils ont moins de mal à s’adapter dans la mesure où leur pays reste influencé par la culture française, donc européenne." À noter que 37 % des immigrés sont favorables à l’interdiction du port du voile. "C’est surtout le cas des femmes, qui, face aux Espagnoles et aux autres, ne souhaitent pas s’infliger un handicap supplémentaire à l’heure de trouver un travail."
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