États-Unis : Hillary Clinton lorgne les Africains-Américains
Depuis sa bataille avec Obama en 2008, ses relations avec la communauté noire se sont dégradées. Un retour de flamme est-il possible avant la présidentielle de 2016 ? Hillary Clinton en est convaincue.
Sa candidature à la présidentielle de 2016 étant une quasi-certitude, Hillary Clinton a déclenché une opération séduction de grande envergure pour tenter de ramener les Africains-Américains dans ses filets électoraux. Le combat sans merci qui, en 2008, l’opposa à Barack Obama lors de la primaire du Parti démocrate a laissé des traces et lui a fait perdre une partie de son crédit. Alors, depuis son départ du secrétariat d’État, en février 2013, elle multiplie oeillades et appels du pied pour tenter d’amadouer les organisations communautaires. Tantôt elle leur présente ses condoléances pour la mort de Trayvon Martin, un adolescent abattu par un vigile, en Floride… tantôt elle se lance devant l’Association des avocats africains-américains dans un vibrant plaidoyer en faveur du droit de vote des minorités. On sait que l’exercice de celui-ci est entravé tant par le démantèlement du Voting Rights Act par la Cour suprême, en juin dernier, que par la multiplication dans les États les plus conservateurs de lois restrictives dont l’objectif hypocritement déclaré est de lutter contre la fraude.
Bref, Mrs Clinton ne rate aucune occasion de se montrer. Début août, elle a prononcé un discours remarqué lors des obsèques de Bill Lynch, le stratège africain-américain de David Dinkins, le premier maire noir de New York (1989-1993). Le même mois, elle a assisté au côté de Bill, son mari, à la célébration du 50e anniversaire de la Marche sur Washington. Et, bien sûr, elle était présente, le 1er janvier, lors de la prestation de serment de Bill de Blasio, le nouveau maire de la ville – qui fut, en 2000, dans l’État de New York, le directeur de sa campagne sénatoriale victorieuse. Lors du scrutin municipal, celui-ci est parvenu à capter 90 % du vote noir en mettant habilement en scène sa famille multiraciale.
Avec Bill – le "premier président noir américain", comme le qualifia un jour Toni Morrison, Prix Nobel de littérature -, Hillary dispose d’une arme redoutable. Car l’ancien président est en campagne électorale permanente. Après avoir contribué à la réélection d’Obama, en 2012, il ne ménage pas ses efforts en vue de faire élire plusieurs de ses amis dans l’Arkansas, son État natal, aux élections de la mi-mandat, à l’automne 2014.
"Les Noirs nourrissent une certaine méfiance à l’égard des Clinton"
Auprès des Noirs, Bill le Sudiste prépare le terrain pour Hillary en faisant… du Clinton. À Philadelphie, il a récemment affirmé sur le ton de la plaisanterie qu’il était le seul Blanc en Amérique à connaître certains versets de l’Évangile. À ce train, il devrait prochainement ressortir son saxophone de son étui ! Son nouveau chef de cabinet est une Africaine-Américaine nommée Tina Flournoy. Elle rejoint la cohorte de conseillers noirs dont les Clinton s’entourent depuis des années.
Le zèle de Bill se comprend : il a beaucoup de choses à se faire pardonner. En 2008, il avait dans un premier temps traité avec condescendance la candidature d’Obama à la primaire démocrate. Il avait ensuite comparé la prise de position du futur président contre la guerre en Irak à un "conte de fées"… "Les Clinton savent que les Noirs nourrissent à leur égard une certaine méfiance, quand ce n’est pas de l’antipathie", commente le révérend Al Sharpton, l’un des leaders de la communauté. Sans doute est-ce exagéré : beaucoup semblent bien avoir passé l’éponge sur ces vieux griefs.
Après tout, Hillary a quand même été pendant quatre ans la secrétaire d’État d’Obama. Et ce dernier, dans une interview télévisée au lendemain de sa réélection, l’a quasiment adoubée comme son successeur. Il est vrai que le discours de Bill en faveur d’Obama lors de la convention démocrate de 2012 est encore dans toutes les mémoires… Certes, l’actuel président affirme ne supporter son prédécesseur démocrate qu’"à petite dose", mais il n’empêche : selon toute apparence, l’histoire d’amour entre les Clinton et les Africains-Américains est encore loin d’être finie.
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