Libreville : face aux abus, les bus
Des taxis trop chers, trop peu nombreux. Et pas d’alternative… jusqu’à maintenant. Pour résoudre les problèmes de transport, l’État veut créer une trentaine de lignes d’autobus.
Libreville dans tous ses états
À l’échangeur de Nzeng-Ayong, l’un des quartiers les plus vastes et les plus peuplés de Libreville, des dizaines de personnes agglutinées sous un soleil écrasant attendent d’embarquer. Chacun lâche un prix supérieur à celui annoncé par son voisin de galère, jusqu’à ce que le taxi objet de toutes les convoitises klaxonne le plus offrant, le fasse monter à bord et redémarre en trombe. "La poste, 200 [F CFA] !" Son trajet a beau être court (moins de 1 km), Maria, une Équato-Guinéenne de 40 ans, n’ose plus proposer aux taxis collectifs le prix qui était en vigueur il y a un an pour la même course – 100 F CFA (0,15 euro). Les chauffeurs ont doublé, voire triplé leurs tarifs, invoquant l’augmentation du coût de la vie et de l’essence, le mauvais état des routes ou encore le racket dont ils font quotidiennement l’objet lors des contrôles policiers. Mais les Librevillois n’ont pas d’alternative aux taxis collectifs. Et la demande est telle qu’ils sont contraints de surenchérir s’ils ne veulent pas rester sur le bord de la route. "Surtout aux heures de pointe !" râle Maria.
Dans une récente étude, l’Agence nationale des grands travaux (ANGT) estime que les deux tiers des Librevillois ont besoin d’un moyen de transport quotidien à bas coût. Ils éprouvent de plus en plus de difficultés à se déplacer, compte tenu du petit nombre de places (4 ou 5) dans les taxis collectifs et des tarifs pratiqués par ces derniers. "Je ne m’en sors pas, tout mon salaire y passe", se désespère Muriel. Elle gagne 100 000 F CFA par mois, mais habite à Melen, un quartier populaire situé à l’extrémité orientale de la ville, qu’elle doit traverser pour se rendre dans les beaux quartiers ouest, où vivent ses patrons.
Une trentaine de lignes devraient être créées
Les pouvoirs publics l’ont bien compris : l’enjeu socio-économique est crucial. Le taux de chômage atteint près de 50 % dans les quartiers modestes. Or, pour que leurs habitants puissent venir travailler dans les bassins d’emploi que constituent le centre-ville et la zone industrielle d’Owendo (commune de la périphérie sud), ils doivent disposer de moyens de transport efficaces, en nombre suffisant et accessibles financièrement.
Pour résoudre ce casse-tête, l’ANGT travaille au déploiement d’un réseau public de bus censé quadriller la capitale dès 2014. Une trentaine de lignes devraient être créées pour relier tous les quartiers, même les plus enclavés et les plus éloignés du centre, avec une capacité prévue de 580 000 personnes transportées par jour, soit plus de 80 % de la population de l’agglomération. Un objectif peut-être trop ambitieux pour être tenu en si peu de temps, mais le projet prend déjà corps : L’État vient d’investir 7,45 milliards de F CFA pour l’achat au Brésil de quelque 150 nouveaux bus de 75 passagers afin d’équiper la Société gabonaise de transport (Sogatra). Au total, 500 autobus doivent être mis en circulation d’ici à la fin de 2016. "Une restructuration totale de la Sogatra sera cependant nécessaire, indique-t-on à l’ANGT. Il faut mettre en oeuvre un business plan, à court et moyen termes, qui assure la meilleure offre possible." Et faire en sorte que le bus ne devienne pas plus cher que le taxi.
Tous les Librevillois espèrent aussi que ce service ainsi que l’extension (en cours) du réseau routier permettront enfin de libérer la ville de ses embouteillages. Aux heures de pointe, la circulation en bord de mer comme sur les axes intérieurs est paralysée par d’interminables bouchons, alors que, comparée à ses homologues régionales Kinshasa, Yaoundé ou Brazzaville, la capitale gabonaise est relativement petite, avec "seulement" 700 000 habitants.
>> Lire aussi notre dossier : le Gabon change-t-il vraiment ?
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