Face à Poutine, Macky Sall vainqueur à la courte table ?

L’Union africaine est-elle venue en Russie pour quémander ou peser sur le conflit ukrainien ? Peu importe pour Macky Sall et Vladimir Poutine, qui peuvent tous les deux s’estimer satisfaits des messages distillés par la photo de leur tête-à-tête.

© Damien Glez

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Publié le 4 juin 2022 Lecture : 2 minutes.

« Même si tu n’aimes pas le lièvre, il faut reconnaître qu’il court vite », dit le proverbe ouest-africain. Et le président en exercice de l’Union africaine ne semble jamais ralentir la cadence de ses cartes postales quotidiennes, au four politique et au moulin économique de sujets continentaux les plus variés. Son omniprésence médiatique serait-elle destinée à masquer un manque d’implication locale du président… sénégalais ? Les grincheux franchissent le pas, eux qui continuent de décrypter le caractère potentiellement divinatoire du récent teaser de Macky Sall : « Mon travail de président est loin d’être fini ».

Et voilà le chef de l’État sénégalais, en compagnie du président de la Commission de l’Union Africaine, Moussa Faki Mahamat, sur les chemins cahoteux de la crise la plus médiatisée, actuellement, à l’échelle planétaire : le conflit ukrainien. Aux grognons occidentaux qui voient désormais d’un mauvais œil qu’on prenne le thé, à Sotchi, avec le pestiféré Poutine, Macky Sall indique que sa visite au maître du Kremlin « s’inscrit dans le cadre des efforts que mène la présidence en exercice de l’Union pour contribuer à l’accalmie dans la guerre ». Diplomate jusqu’au bout des ongles, il ajoute qu’il accorde de mêmes tranches d’agenda au président ukrainien, l’UA ayant « accepté la demande du président Volodymyr Zelensky d’adresser un message à l’organisation par visioconférence ».

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Libérer les stocks de céréales

Aux bougons ouest-africains qui pourraient se sentir négligés, le président sénégalais explique que le séjour russe était destiné à négocier « la libération des stocks de céréales et de fertilisants dont le blocage affecte particulièrement les pays africains ». Mardi, il évoquait déjà, en direction des dirigeants des pays européens réunis à Bruxelles, « le scénario catastrophique de pénuries et de hausses généralisées des prix » résultant du blocus en mer Noire.

Après le face-à-face Macky-Vladimir, la communication fera le reste. En mode propagande pour le déclaré afrophile Poutine qui ne snobe plus un cliché avec un chef d’État, qui plus est un responsable continental. Le chef du Kremlin est conscient qu’une certaine « poutinolâtrie » anime des rues africaines, même si tous les dirigeants de l’UA. n’ont pas la même position officielle sur le dossier ukrainien.

Quant au Sénégalais, rappelant que la visite en Russie s’est faite « à l’invitation de Vladimir Poutine », il capitalisera tout autant sur les messages subliminaux que sur d’hypothétiques avancées diplomatiques à dimension céréalière. De ce point de vue, le cliché de la rencontre jure avec celui de Poutine recevant Macron le 7 février dernier. Une table nue et aux couleurs froides de six mètres séparait le Russe du Français, tandis qu’un guéridon ébène circulaire garni d’un bouquet blanc, jaune et rose permettait à Poutine et Sall de n’être séparés que d’un bon mètre. Pour Macron : des fauteuils de travail et un visage verrouillé du maître du Kremlin. Pour le président de l’Union africaine : de larges fauteuils qui inspirent la détente et un sourire chaleureux de son hôte… Si la pensée populaire trouve « le diable dans les détails », les diplomates évaluent l’importance d’un interlocuteur aux choix scénographiques précis retenus par un hôte…

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