Minerais « verts » : changement de paradigme dans l’industrie extractive

Transformation locale, extraction responsable, filière intégrée… Le nouveau vocabulaire minier annonce une évolution des préoccupations des investisseurs, mais aussi des retombées pour les pays producteurs.

Mine de bauxite en Guinée. © AFP

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Publié le 14 juin 2022 Lecture : 3 minutes.

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Africa CEO Forum 2022 : les nouveaux chemins de la prospérité

Les 13 et 14 juin, 1500 décideurs se sont rassemblés à Abidjan pour tracer les voies de la croissance africaine de demain, dans le cadre de l’Africa CEO Forum, dont on célébrera les dix ans d’existence. Une édition placée sous le signe de la transition énergétique et de la transformation économique.

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« Just transition for communities », ou la « transition juste pour les communautés » : tel est le nouveau standard de l’industrie minière si l’on en croit Christian Mion, associé senior de EY Consulting en charge des mines et de l’énergie pour l’Europe, le Moyen-Orient et l’Afrique. Celui-ci intervenait en ouverture du panel consacré aux minerais « verts » et aux opportunités qu’ils offrent à l’Afrique organisé lors de la deuxième journée de l’Africa CEO Forum à Abidjan.

De fait, « les critères Environnementaux Sociaux et de Gouvernance (ESG) s’invitent dans l’industrie minière », explique Souleymane Traoré, le directeur général de la Compagnie des bauxites de Guinée (CBG), qui confirme ce changement de paradigme. « Autrefois, ce qui comptait avant tout aux yeux des investisseurs, c’était la teneur en bauxite de notre minerai. Dorénavant, ce qui leur importe, c’est de savoir si cette bauxite est extraite de manière responsable et si elle bénéficie aux populations locales », poursuit-il. Avant d’ajouter : « Il ne sera pas long à arriver le moment où deviendra indispensable, une labellisation complète des minerais tenant compte de leur origine et de leur mode d’extraction, voire de leur mode de transformation locale. »

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Intégration au Ghana

Pour Philippe Bourdeaux, vice-président senior de Veolia, chargé de l’Afrique et du Moyen Orient, il s’agit désormais « d’un enjeu de réputation de marque » pour les opérateurs miniers sur le continent et ailleurs. Dans leur chaîne de valeur, les compagnies de la filière extractive ne peuvent tout simplement plus opérer sans prévoir le traitement de leurs rejets, de leurs eaux usées et l’utilisation d’une énergie responsable, soit les trois métiers du géant tricolore. Veolia intervient déjà sur ces fronts pour le compte d’AngloGold Ashanti Ltd au Ghana ; l’entité y voit un gisement d’opportunités pour la filière.

S’assurer que les populations locales bénéficient des retombées du secteur extractif, c’est la stratégie que déploie quant à lui le ministre ghanéen des Terres et des Ressources minérales, Samuel Jinapor. Le producteur ghanéen d’aluminium Valco (Volta Aluminium Co) a été créée en 1962 pour mettre en valeur les gisements de bauxite du pays. Mais depuis cette époque, la filière vivote car le Ghana importe l’alumine – étape intermédiaire de transformation de la bauxite – au lieu de la fabriquer sur place et ainsi, de créer de la valeur localement. L’administration minière ghanéenne se fixe comme objectif d’installer sur le territoire une raffinerie d’alumine et de bénéficier ainsi des retombées économiques d’une filière pleinement intégrée.

R&D au Maroc

Cette approche d’intégration figure aussi au centre de la stratégie d’entreprise de Managem, explique Naoual Zine, directrice générale de Reminex, la filiale R&D et d’ingénierie du groupe minier marocain. « Si Managem a pu déployer sans relâche cette politique de maîtrise complète de la chaîne de valeur, c’est grâce au soutien inconditionnel et à la vision à long terme de son actionnaire Al Mada, dont le slogan est ‘positive impact’ ».

Quand certaines mines de son portefeuille ne rapportaient pas de bénéfices, Managem n’interrompait pas pour autant l’activité des sites en question ; au contraire, les programmes de R&D de Reminex se poursuivaient en parallèle pour déboucher au final sur des brevets développés in-house comme pour la fabrication de cathodes de cobalt, ou encore d’unités hydro-métallurgiques de transformation de métaux. Le royaume chérifien en abrite actuellement une dizaine.

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