Ahmed Ould Daddah : « Le jour des législatives, nous serons présents à notre manière »
Pendant deux ans, le chef de file de l’opposition a refusé de participer au dialogue national. À la veille des législatives et des municipales, il campe sur ses positions et boycottera les scrutins.
Mauritanie : Aziz au banc d’essai
À l’instar de dix des onze formations politiques de la Coordination de l’opposition démocratique (COD), qu’il préside, Ahmed Ould Daddah a décidé que son parti ne participerait pas aux élections législatives et municipales prévues les 23 novembre et 4 décembre. Pour le président du Rassemblement des forces démocratiques (RFD), l’enjeu est pourtant de taille : à 71 ans, il remet en jeu son titre de chef de file de l’opposition, attribué par le Conseil constitutionnel en 2007. L’intraitable opposant n’a certes rien perdu de sa ténacité, mais, en misant sur la politique de la chaise vide, il risque de se marginaliser.
Jeune Afrique : Pourquoi dix des onze partis de la COD, dont vous êtes le président, refusent-ils d’aller aux élections ?
Ahmed Ould Daddah : Nous souhaitions participer à l’ensemble du processus électoral, depuis la localisation des bureaux de vote jusqu’à la proclamation des résultats. Cette proposition devait constituer une garantie pour chacun. Or le pouvoir nous l’a refusée. S’il n’avait rien eu à cacher, il n’aurait eu aucune raison de réagir ainsi.
Les élections sont un moment très important dans une démocratie. Pas dans une dictature
En refusant de vous confronter au vote des citoyens, comment espérez-vous continuer à peser dans la vie politique du pays ?
Les élections sont un moment très important dans une démocratie. Pas dans une dictature. Elles ne sont alors qu’un prétexte pour légitimer des résultats connus à l’avance. Les médias audiovisuels étant en situation de quasi-monopole, nous exprimons nos idées par le biais de communiqués, d’articles de presse, de meetings, de marches et de sit-in. Le jour du vote, nous serons présents à notre manière à travers tout le territoire, afin de mesurer la participation réelle des électeurs.
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Tout avait pourtant bien commencé puisque vous aviez accepté de prendre part au dialogue préélectoral avec le pouvoir, début octobre.
Comme à son habitude, le pouvoir fait semblant de discuter. Mais il ne se considère lié par aucune des décisions issues des rencontres auxquelles il participe. Ce n’est plus acceptable. Depuis deux ans, l’Assemblée nationale et les conseils municipaux n’ont pas été renouvelés comme ils auraient dû l’être.
Les députés de l’opposition n’ont jamais cessé de dénoncer les dérives du pouvoir. Et Dieu sait qu’il y en a eu.
Vos élus ont pourtant continué de siéger au Parlement…
Ce Parlement ayant été maintenu, nous avions le droit, voire le devoir, de continuer à nous informer de ses activités. Les députés de l’opposition n’ont jamais cessé de dénoncer les dérives du pouvoir. Et Dieu sait qu’il y en a eu.
Il y a eu une défection dans vos rangs. Tawassoul, le parti islamiste dirigé par Jemil Ould Mansour, a décidé de prendre part au scrutin. Le regrettez-vous ?
En tant qu’actuel président de la COD, je préférerais que nous avancions ensemble. Mais je ne me donne pas le droit de juger un parti sur ses choix. à la fin, c’est l’opinion qui arbitrera. Nous avons appelé au boycott actif du scrutin et demandé aux Mauritaniens de rester chez eux. Ils se rendront certainement compte de la contradiction entre le taux de participation officiel et le réel.
Tawassoul fait-il toujours partie de la COD ?
Pour le moment, et jusqu’à la fin des élections, il a suspendu ses activités au sein de la Coordination.
Pourra-t-il la réintégrer plus tard ?
C’est lui qui en prendra l’initiative. Notre porte est ouverte.
Et quelles sont vos relations avec Messaoud Ould Boulkheir, le président de l’Assemblée nationale, qui remet lui aussi son fauteuil en jeu ?
Pour le moment, nous sommes chacun d’un côté de la barrière, puisqu’il participe à ces élections. Mais nos relations personnelles sont normales.
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Propos recueillis à Nouakchott par Justine Spiegel
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