Vatican : Francesca Chaouqui, pieuse et sulfureuse…

Fille d’un immigré marocain et lobbyiste accomplie, Francesca Chaouqui est la première femme à siéger au sein de la nouvelle et influente commission des finances du Vatican.

L’une des photos diffusées sur internet par Francesca Chaouqui. © Vatican 2013

L’une des photos diffusées sur internet par Francesca Chaouqui. © Vatican 2013

Publié le 21 novembre 2013 Lecture : 4 minutes.

Brushing savamment décoiffé et allure de mannequin, « Francy » Chaouqui aurait pu figurer en bonne place dans l’aréopage féminin de Silvio Berlusconi ; mais, de manière tout à fait inattendue, c’est aux côtés du pape François que cette avocate entame une nouvelle étape de sa carrière. De mémoire de Pierre, aucune femme jeune et jolie n’avait jamais occupé poste aussi important que celui de membre de la commission des finances chargée des réformes des circuits économiques du Vatican. Pourtant, à l’âge de 32 ans, Francesca Chaouqui est loin de la retenue censée renouveler l’image de l’Église catholique. De surcroît, cette Calabraise aux dents longues a failli se saborder en embarrassant la curie. Sur sa page Facebook, elle a publié des photos suggestives où elle posait assez dévêtue (voir ci-dessous). L’association américaine GoTopless l’a même félicitée, estimant qu’il était temps « de mettre fin à des siècles de morale rétrograde imposée par l’Église catholique. » Mais Rome s’émeut surtout de ses dérapages sur les réseaux sociaux. À l’origine de la fuite sur la leucémie de Benoît XVI, elle a aussi accusé de corruption le tout-puissant Tarcisio Bertone, ancien secrétaire d’État du Vatican, et soutenu que Giulio Tremonti, ancien ministre italien de l’Économie et des Finances, était homosexuel. « Je ne suis pas la seule à gérer mon compte. Je suis victime d’un piratage, on veut me nuire », assure la belle, qui se dit « tranquille parce que le Saint-Père l’est aussi », mais qui a clos tous ses comptes et désigné la célèbre avocate Giulia Bongiorno pour sa défense.

Pour moins que cela, d’autres auraient perdu leur poste. Mais si Chaouqui est tout sauf discrète, elle a aussi des appuis – et non des moindres. Celle qui a mis à profit une très brève carrière de journaliste à Roma In pour approcher Giulio Andreotti a obtenu de l’ancien président du Conseil qu’il lui mette le pied à l’étrier en l’adressant à l’un des plus importants cabinets d’avocats romains, Pavia e Ansaldo. « Je l’ai ému avec les récits de mon enfance », raconte cette native de Rosano. Fille d’un immigré égyptien parti en France à sa naissance en abandonnant sa concubine, Francesca Chaouqui n’évoque jamais ses origines arabes. Pour elle, le temps de la revanche contre une enfance modeste et morne est venu. Avec pragmatisme et détermination, la nouvelle conseillère du pape, chargée de convaincre le monde que « la puissance économique du Vatican est transparente », applique à la lettre les conseils de sa tante : « Rêve de l’impossible et vis-le ! »

Élevée dans une famille de femmes, elle a eu le prêtre de Rosano comme père de substitution.

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La fille du Sud, élevée dans une famille de femmes, a eu le prêtre de Rosano comme père de substitution. Il a fait d’elle une fervente catholique, mais pour avoir trop entendu « tu es une fille, tais-toi ! » elle conserve une rancoeur tenace contre une région natale aux moeurs machistes. Après un échec en médecine, elle opte pour le droit à l’université Santa Croce, fondée par l’Opus Dei. Son mari, Corrado Lanino, croisé à l’âge de 17 ans lors d’un chat sur la religion, est conseiller en informatique et expert en sécurité au Saint-Siège… Derrière ces histoires où le hasard fait trop bien les choses, Francesca Chaouqui construit son personnage. « Je suis ambitieuse et croyante », assène celle qui aura pour mentor la comtesse Marisa Pinto Olori del Poggio, au prestigieux carnet d’adresses. Chaouqui lui doit tout : la diplomate, qui descend d’une illustre famille romaine, parachève son éducation, lui apprend à recevoir et l’introduit dans les cercles les plus fermés, dont ceux de la curie. « Pour mettre en contact deux personnes, trouve leur point d’intérêt commun et travaille sur cette base » : ce conseil sera le second dont Francesca fera bon usage. Notamment pour se faire une place dans les relations publiques au sein du cabinet international Orrick, spécialisé dans les opérations financières d’envergure.

De rencontres en relations, Francy tisse sa toile avec les figures phares de l’économie, la crème du pouvoir et le gotha journalistique. Lobbyiste accomplie, elle devient conseillère en communication chez Ernst & Young, mais c’est un appel, en juin 2013, de Mgr Lucio Vallejo Balda, secrétaire de la Préfecture pour les affaires économiques du Vatican, qui fait basculer sa vie. Elle sera la première femme à avoir accès aux informations les plus confidentielles du Saint-Siège. « Pourquoi ai-je été choisie ? C’est sans doute le fruit de mon travail, n’en déplaise à certains », assure celle qui, malgré une attitude un brin sulfureuse, semble agir selon les indications des hommes de l’ombre de la curie. « Spirituellement, je suis très proche de l’Opus Dei », confie-t-elle. Elle a, au fil du temps, entretenu d’excellentes relations avec divers cardinaux et sait bien que cette prélature personnelle de l’Église, malgré les scandales financiers, joue un rôle toujours plus important au Vatican. Certains de ses membres sont d’ailleurs si proches du pape François qu’il serait sous influence…

>> D’autres photos diffusées par Francesca Chaouqui :

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