Nigeria : Farah Dagogo, le pirate devenu businessman
Pas du genre à prendre la mer, mais à commander depuis la terre ferme, le flibustier Farah Dagogo est devenu un businessman respectable.
Il est l’honorable directeur général d’une société nigériane spécialisée dans l’énergie, avec, comme il se doit maintenant, un compte LinkedIn. Pourtant, il y a seulement cinq ans, Farah Dagogo était l’un des hommes les plus recherchés du Nigeria. Son tort ? Être un pirate comparable au Somalien Afweyne : pas du genre à prendre la mer, plutôt à commander depuis la terre ferme.
La piraterie dans le delta du Niger n’a pas la même définition qu’au large de la Somalie. Ici, pas ou peu de prises d’otages et de détournements : on pille les navires et leur cargaison (du pétrole la plupart du temps) qu’on s’empresse de revendre dans toute la sous-région. Au départ, dans les années 1990, il y a une revendication politique (une meilleure redistribution des fruits de l’intense extraction pétrolière) concentrée dans le seul delta du Niger. Mais à la non-violence des premiers groupes de militants se substitue rapidement une approche militarisée. Pour se faire entendre, des groupes armés, dont le Mouvement pour l’émancipation du delta du Niger (Mend), attaquent les intérêts des compagnies pétrolières : kidnapping, détériorations des installations et des oléoducs… Puis, bientôt, des groupes mafieux apparaissent. Le delta du Niger devient une zone en guerre qui coûte cher au Nigeria : en 2009, la production était estimée à 1,6 million de barils par jour, contre 2,6 millions en 2006. La production offshore n’est pas épargnée. Les attaques dans le golfe de Guinée se multiplient.
C’est là qu’apparaît Farah Dagogo. En 2008, les escarmouches entre les forces de sécurité et les pirates sont nombreuses. Le 20 juin, des hommes du Mend attaquent une plateforme située à 120 km des côtes et démontrent que leur capacité d’action va bien au-delà du seul delta. Trois mois plus tard, l’armée nigériane lance une offensive dans l’État de Rivers. Objectif : arrêter Farah Dagogo, que les autorités présentent comme l’un des dirigeants du Mend. En représailles, le Mend lance l’opération Barbarossa, qui a pour but de détruire l’industrie pétrolière de la région.
Depuis, la piraterie prospère. Dagogo, lui, a pris sa "retraite". En 2009, il a accepté la main tendue par le président Umaru Yar’Adua et, en échange de sa reddition et de ses armes, a profité, avec d’autres pirates célèbres (dont Ateke Tom et Tompolo), d’une amnistie.
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