Tunisie : ce que l’on sait de l’affaire Hamadi Jebali

L’ancien chef du gouvernement a été arrêté à Sousse, le 23 juin. Transféré à Tunis, il a entamé une grève de la faim, avant d’être admis d’urgence en réanimation. Explications.

L’ancien chef du gouvernement tunisien Hamadi Jebali. TUNIS, TUNISIA – AUGUST 29: Independent candidate for the September 15 presidential election, Hamadi Jebali speaks during an exclusive interview in Tunis, Tunisia on August 29, 2019. © NACER TALEL/Anadolu Agency via AFP

Publié le 27 juin 2022 Lecture : 3 minutes.

Branle-bas de combat sur les réseaux sociaux, puis dans les médias au matin du 25 juin : l’ancien chef du gouvernement, Hamadi Jebali, 72 ans, a été admis d’urgence en réanimation à l’hôpital Habib-Thameur, à Tunis. Selon nos informations, il s’y trouve toujours.

Ce qui aurait pu être un simple bulletin de santé à la suite du malaise d’une personnalité devient l’actualité du jour. Car depuis le 23 juin, la situation de Hamadi Jebali est tout sauf anodine : il est entendu par les services de police, qui n’ont pas précisé ce qui lui est reproché. Sa famille, qui n’a pu le voir, a lancé un appel de détresse et alerté sur sa cardiopathie sévère.

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Défaut de papiers

Contrôlé dans l’après-midi du 23 juin, à Sousse, au volant de sa voiture, Hamadi Jebali a été interpellé et conduit au commissariat de police faute d’avoir pu produire une pièce d’identité. Un incident d’autant plus inattendu que l’ancien leader du parti islamiste Ennahdha, qui a pris ses distances avec l’activité politique depuis son départ du gouvernement en 2014, est connu comme le loup blanc à Sousse, son fief natal, où il vit avec sa famille.

De toute évidence, cette arrestation n’est pas le fruit du hasard, car lorsque Hamadi Jebali a demandé un renouvellement de son passeport il y a quelques mois, sa carte d’identité ne lui a pas été restituée.

Au moment du contrôle, son portable ainsi que celui de son épouse ont été confisqués. Sans connaître les réels motifs de son interpellation, il a ensuite été transféré à Tunis pour être entendu par le pôle judiciaire antiterroriste, qui avait ordonné que l’ex-chef du gouvernement lui soit présenté pour les besoins d’une enquête.

Hamadi Jebali entame une grève de la faim dès sa première soirée de préventive sans que personne évalue son état de santé. Lors d’un point presse, le 24 juin, les autorités précisent que Hamadi Jebali, sans le citer nommément, est soupçonné de blanchiment d’argent en lien avec l’association caritative Namaa Tounes, qu’il préside.

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L’enquête a été ouverte après que la Commission tunisienne des analyses financières (CTAF), cellule de renseignement financier de la Banque centrale de Tunisie (BCT), a relevé des mouvements financiers suspects, du moins peu concordants avec une activité de bienfaisance. Aucun autre détail sur l’affaire ne sera fourni.

Indignation

Ce n’est pas la première fois que Hamadi Jebali est inquiété. En mai, son épouse a été entendue après l’arrestation d’un clandestin subsaharien qu’elle employait pour détention de « substance à combustion rapide et des bouteilles d’acétylène, réputées dangereuses » dans l’atelier dont elle est propriétaire. Finalement, les analyses ont révélé qu’il s’agissait simplement de produits de peinture industrielle.

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« Il est évident que les islamistes sont dans le collimateur du pouvoir », note un avocat du collectif de défense de Hamadi Jebali. Certains rappellent que l’ancien locataire de la Kasbah a participé aux attentats contre des hôtels à Sousse et Monastir (Sahel), le 2 août 1987, revendiqués par le Mouvement de la tendance islamique (MTI, future Ennahdha) et que c’est une grâce présidentielle qui lui a permis d’échapper à une condamnation à mort.

La situation suscite l’indignation, d’abord chez ses anciens compagnons de route d’Ennahdha, dont son président, Rached Ghannouchi, mais aussi chez les militants des droits de l’homme, notamment Ahmed Nejib Chebbi, qui dénonce une arrestation abusive.

Le Club de Madrid, qui rassemble d’anciens présidents et chefs de gouvernement, dont Hamadi Jebali, est également intervenu pour plaider en faveur de sa libération « dans le respect de ses droits et libertés, tels qu’ils sont garantis à tous les citoyens tunisiens par la Constitution du pays ».

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