« Halalpolitie », les poulets du halal

Fouad Laroui © DR

Publié le 21 octobre 2013 Lecture : 2 minutes.

Aussi incroyable que cela puisse paraître, il existe aux Pays-Bas une organisation qui s’appelle "Halalpolitie", c’est-à-dire "la police halal". C’est une association privée qui a son site internet (halalpolitie.nl), et dont le but est de contrôler si la nourriture vendue comme halal l’est vraiment. Jusqu’à présent, on n’en avait pas trop entendu parler, mais, la semaine dernière, elle a fait un coup d’éclat. Ses inspecteurs ont enquêté dans la chaîne de supermarchés "Tanger", et le couperet est tombé : selon "Halalpolitie", ce que vend cette chaîne, ou du moins sa filiale de La Haye, n’est pas plus halal que ce que dévorent habituellement les Vikings, les Chinois ou M. Le Pen.

Dans les milieux musulmans du pays, l’affaire a fait grand bruit, à tel point que la direction des supermarchés "Tanger" a reçu deux représentants de la police halal pour leur affirmer qu’elle reniait sa filiale de La Haye, qu’elle n’avait rien à voir avec elle, etc. C’est tout juste si ladite filiale n’a pas été enduite de goudron et de plumes et chassée dans le désert sous les huées de la foule. De plus, les supermarchés ont dû promettre à la police halal qu’ils allaient passer un contrat avec une organisation nommée "Halal Correct", qui devrait désormais contrôler tous leurs achats pour vérifier qu’ils sont bien halal. Un cachet indélébile sera apposé sur ce qui est permis et refusé à ce qui ne l’est pas.

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Soyons clair : il ne s’agit pas ici de se gausser de tout cela, ni de le condamner. Après tout, il y a des associations privées qui contrôlent si ce qui est vendu sous le nom de "bio" ou d’"organique" l’est vraiment. Et les végétariens ont également le droit d’avoir leur système de vérification : il serait fâcheux de croquer un écureuil déguisé en courgette. Les musulmans des Pays-Bas ont donc parfaitement le droit d’être vigilants sur ce qu’ils ingurgitent. Mais ce qui me gêne, c’est le nom qu’a pris cette organisation : "la police halal". Franchement, n’aurait-on pas mieux fait de choisir un nom moins menaçant ?

En effet, le propre de la police, c’est qu’elle considère que tout est de son ressort. D’où la question : et si la Halalpolitie outrepassait ses attributions actuelles ? Si elle créait une direction du film qui instaurerait une censure sur les cinémas et sur la télévision ? Si elle mettait sur pied des patrouilles de volontaires, sur le modèle de ce qui se fait en Arabie saoudite, pour vérifier que les jupes, dans les quartiers à forte population marocaine, ne sont pas trop courtes ni les cheveux trop libres ? Ou bien qui entendraient obliger quiconque ressemble à un Rachid ou à un Ali à aller cinq fois par jour à la mosquée du coin ? Bref, halal oui, police non ! Espérons que si les choses vont trop loin, l’État se réveillera. Et qu’il fera fermement remarquer à toutes les communautés que la seule police qui vaille, dans un pays démocratique quoique multiculturel, est la sienne : celle de l’État.

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