Poutine écoutera-t-il le père du Marocain condamné à mort en Ukraine ?

Le père de Brahim Saadoun, l’étudiant marocain condamné à mort par les séparatistes prorusses d’Ukraine, s’est adressé au maître du Kremlin et au président de la République populaire de Donetsk.

© Damien Glez

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Publié le 30 juin 2022 Lecture : 2 minutes.

Il y a le Poutine « autocrate agresseur » dépeint par les autorités occidentales et le Poutine « anticolonialiste solidaire » décrit par les autoproclamés non-alignés. Verrons-nous surgir, dans l’actualité, le Poutine paternel usant de mansuétude pour sauver Brahim Saadoun ? L’étudiant marocain de 21 ans a été condamné à mort, le 9 juin dernier, par les autorités séparatistes de Donetsk, dans l’est de l’Ukraine, pour avoir participé aux combats avec l’armée ukrainienne et donc pour « terrorisme et tentative de renversement de l’ordre constitutionnel ». Ses accusateurs le qualifient de « mercenaire » pour avoir porté l’uniforme d’une unité de la Marine ukrainienne. Le jeune homme risque de se retrouver devant le peloton d’exécution dès le début du mois de juillet.

Discours ému

C’est avec une stratégie d’une grande finesse que le père du condamné est intervenu dans les médias, lui qui a compris que la simple esbroufe mélodramatique était plutôt de nature à agacer les Russes et les prorusses. Tout d’abord, pour contrecarrer l’accusation de mercenariat, Taher Saadoun diffuse l’information diplomatique selon laquelle son fils, étudiant ingénieur en aéronautique établi en Ukraine depuis 2019, disposerait de la nationalité ukrainienne. Par ailleurs, pour mieux aborder le Kremlin et les autorités de Donetsk, il tisse son discours ému avec une parfaite maîtrise des déclarations passées de ses interlocuteurs.

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Se disant « confiant » en un tribunal qu’il dit considérer « indépendant », il se refuse à agiter l’éventualité du buzz que provoquerait sa présence sur place. Adressant un message direct au président de la République populaire de Donetsk, il dit avoir lu certaines des interviews de celui-ci où était évoquée l’attente de « toute intervention, quoi qu’il arrive, même de la part de parties non-officielles ». C’est pour cela qu’un autre message, adressé au président de la Russie, demande une intervention « par le biais d’organisations humanitaires et non officielles, d’ONG ».

Maintenir la pression

Certes, la répression constante des ONG par Vladimir Poutine et la mise en spectacle intransigeante de la condamnation du jeune Marocain n’augure aucune issue rapide. Conscient que les Ukrainiens médiatisent aussi les procès de leurs prisonniers, Denis Pouchiline, le président de la République populaire de Donetsk, a pour l’instant rejeté une levée de la condamnation de ceux qui viennent « en Ukraine tuer des civils pour de l’argent ».

Deux dernières cartes sont entre les mains du père meurtri, s’il veut retarder l’exécution de la sentence. Faire appel devant le tribunal et maintenir la pression sur le Premier ministre marocain, Aziz Akhannouch, dont il négocie l’implication. Sans que l’on puisse préjuger d’éventuelles négociations diplomatiques discrètes, la récente communication de l’ambassade marocaine en Ukraine emprunte le registre de Ponce Pilate. La diplomatie du royaume souligne, sans autre commentaire, que Brahim Saadoun « a été capturé portant l’uniforme de l’armée de l’État d’Ukraine » et qu’il « se trouve actuellement emprisonné par une entité qui n’est reconnue ni par les Nations unies ni par le Maroc »…

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