« Rwanda 94 » : requiem pour Bisesero

La troisième et dernière partie de « Rwanda 94 », une pièce de six heures, revient sur un épisode symbolique du génocide : la résistance et la solidarité des habitants de la colline de Muyira.

Image d’illustration. © DR

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ProfilAuteur_PierreBoisselet

Publié le 16 octobre 2013 Lecture : 2 minutes.

C’est sans doute l’épisode le plus fortement symbolique de l’histoire du génocide rwandais. La résistance des habitants du massif de Bisesero rejoints par des milliers de Tutsis menacés (ils ont été jusqu’à 50 000 personnes) a duré près de trois mois entre avril et juillet 1994, avec des moyens dérisoires et un courage exemplaire, face à des forces armées, financées et organisées par le régime de l’époque. "Alors que les aspects les plus horribles de l’homme se déchaînaient, quelque chose de beau s’est dégagé : la solidarité, la résistance, la lutte jusqu’au dernier souffle", explique Jacques Delcuvellerie, metteur en scène français de Rwanda 94, une pièce de près de six heures.

La Cantate de Bisesero, qui en était à l’origine la troisième et dernière partie, a été donnée à la Maison des métallos, à Paris, du 9 au 13 octobre, à l’occasion de la sortie du coffret DVD de l’œuvre complète (Rwanda 94, de Jacques Delcuvellerie et Mathias Simons, coffret de cinq DVD comprenant également trois documentaires.). C’était la première représentation depuis la fin de la tournée internationale, en 2005.

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Cette cantate est un récit épique de près de une heure, à la fois précis et émouvant, de ces mois de lutte. Sur une composition très belle de Garrett List pour deux chanteurs, cinq comédiens déclament leur texte, qui reprend notamment des témoignages de survivants de Bisesero. "Sur la colline de Muyira vivaient, avant le génocide, de nombreux hommes forts. Sur la colline de Muyira reste une poignée d’hommes qui maintenant meurent de chagrin", est-il répété, devant un grand mur rouge terre qui sert de fond à la scène. Dans le livret, le courage et la détermination côtoient l’horreur brute des violences, le souvenir détaillé du massacre de leurs proches par des survivants et cette idée d’une fin inéluctable qui se rapproche un peu plus chaque jour. De fait, seulement 800 personnes ont finalement survécu.

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Un texte d’une précision historique

Bien qu’élaboré en 2000, à une époque où le recul sur cette tragédie sujette à de multiples tentatives de manipulation était plus limité, le texte frappe aujourd’hui par sa précision historique tant il a été corroboré, depuis, par des enquêtes journalistiques. Ainsi, le rôle pour le moins ambigu des soldats français de l’opération Turquoise, qui ont laissé les survivants de Bisesero sans assistance pendant trois jours après les avoir découverts, est décrit précisément, en dépit de la version très différente donnée par Paris. Cela a d’ailleurs valu quelques ennuis à la troupe : lorsqu’elle s’est déplacée au pays des Mille Collines pour la dixième commémoration du génocide, en 2004, elle s’était vu refuser sa représentation au centre culturel franco-rwandais de Kigali par l’ambassade de France tant qu’elle ne consentirait pas à des "aménagements". "Ils réclamaient des modifications purement politiques, au sujet du rôle de la France avant et pendant le génocide", se souvient Jacques Delcuvellerie.

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Ce dernier espère continuer sur la lancée de cette nouvelle représentation et se produire au Rwanda pour le vingtième anniversaire, en 2014. Peut-être l’ambassade de France fera-t-elle preuve, cette fois-ci, d’ouverture d’esprit.

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