Venezuela : Maduro ou l’éternel complot

Six mois après son arrivée au pouvoir, Nicolás Maduro, le successeur de Hugo Chávez multiplie les provocations antiaméricaines. Une tactique éprouvée pour faire oublier le marasme économique.

Nicolas Maduro fait le clown dans une banlieue de Caracas, en août. © Juan Barreto/AFP

Nicolas Maduro fait le clown dans une banlieue de Caracas, en août. © Juan Barreto/AFP

Publié le 10 octobre 2013 Lecture : 2 minutes.

"Yankees, rentrez chez vous, quittez le Venezuela, ne commettez plus d’abus contre cette patrie qui n’aspire qu’à la paix !" C’est en ces termes fortement sentis que, lors d’une allocution télévisée le 30 septembre, Nicolás Maduro a donné quarante-huit heures pour quitter le pays à trois diplomates américains qu’il accuse de financer diverses opérations de sabotage de l’économie et du réseau électrique. Avec l’aide de l’opposition, bien sûr. Le lendemain, les États-Unis ont à leur tour expulsé trois diplomates vénézuéliens. Les deux pays entretiennent d’exécrables relations. Depuis le renvoi de leurs ambassadeurs respectifs, en 2010, leurs représentations diplomatiques sont assurées par des chargés d’affaires.

Obsédé par des complots yankees

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La liste des délires paranoïaques de Maduro est longue. En août, il affirmait qu’une éventuelle intervention américaine en Syrie visait en réalité à masquer une attaque contre le Venezuela ! Il y a quelques jours, il a refusé de se rendre à l’Assemblée générale des Nations unies, à New York, craignant paraît-il pour son "intégrité physique". Hugo Chávez, son mentor, a toujours été obsédé par d’hypothétiques complots yankees : c’était pour lui le moyen d’amener les Sud-Américains à faire bloc derrière lui face à Washington. De ce point de vue, Maduro n’innove pas. Mais il ajoute à cette monomanie une touche plus personnelle.

"Ce genre d’accusations est bien commode à l’approche d’une élection", commente Luis Vicente León, président de l’institut de sondages Datanalisis, à Caracas. Or les municipales auront lieu le 8 décembre. On comprend que le président cherche à occulter les graves difficultés économiques auxquelles le pays est confronté. L’interminable maladie de Chávez (2011-2013) puis deux campagnes présidentielles successives (octobre 2012 et avril 2013) y ont évidemment contribué. Les pénuries alimentaires récurrentes ? Les coupures d’électricité ? Tout est forcément la faute de l’opposition.

Rationnement et corruption

Dans les supermarchés, la tension est à son comble depuis le début de l’été. Après le papier hygiénique, voici que l’huile, le sucre et la farine viennent à manquer. "Il faut faire la queue des heures durant pour n’obtenir parfois qu’un paquet ou deux. Pas facile de nourrir une famille dans ces conditions", se plaint une Vénézuélienne contactée par téléphone. Les conditions de vie se dégradent, le taux d’inflation culmine à 32 % et de nombreuses entreprises quittent le pays. "Depuis que Maduro est au pouvoir, le contrôle des changes s’est durci, le gouvernement régule tout et la corruption atteint des proportions effrayantes", explique, à Madrid, l’avocate Mariale Rodriguez Mikelson, analyste politique sur ­perspectivasvenezuela.com.

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Pour les élections de décembre, les sondages accordent néanmoins 45,6 % des intentions de vote aux candidats du Parti socialiste unifié (PSUV), au pouvoir, et 30,3 % à ceux de l’opposition, à en croire l’institut Datanalisis. Mais si le parti présidentiel paraît assuré de remporter le plus grand nombre de municipalités, les autres formations obtiendront sans doute de bons scores dans les grandes villes. "Maduro va utiliser les résultats du scrutin pour asseoir sa légitimité et tenter de discréditer l’opposition, qui criait à la fraude lors de la présidentielle, analyse Mariale Rodriguez Mikelson. Mais il n’a ni le charisme de Chávez ni l’ascendant que celui-ci avait sur son entourage. Jusqu’où est-il capable d’aller ?"

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