Robert Sarah, Paris Match et Vincent Bolloré : un cardinal guinéen dans un jeu de quilles franco-français

Derrière la couverture consacrée au cardinal africain conservateur Robert Sarah, la rédaction de l’hebdomadaire français Paris Match voit la main de son nouvel actionnaire Vincent Bolloré…

 © Damien Glez

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Publié le 7 juillet 2022 Lecture : 2 minutes.

Alors que l’annulation du voyage africain du pape François fait bruire des rumeurs de santé défaillante, le grand jeu du casting des “papables” reprend peu à peu. Le versant afrophile de cette compétition de bookmakers est relancé : une seconde démission de souverain pontife – après celle du toujours vivant Benoît XVI – pourrait-elle consacrer l’élection d’un pape noir, singulièrement africain, le continent incarnant statistiquement l’avenir du peuple catholique ? Et voici à nouveau cité le nom du Guinéen Robert Sarah, au cœur d’un bras de fer médiatico-idéologique…

C’est au prélat de 77 ans, auteur du récent ouvrage Catéchisme de la vie spirituelle, que le prestigieux hebdomadaire français Paris Match consacre sa couverture du 7 juillet, avec la coupole du Vatican en arrière-plan. Si l’on se réfère au célébrissime slogan publicitaire de la publication – « Le poids des mots, le choc des photos » -, le choix de consacrer sa Une à un parfait inconnu du public français pourrait interroger. Il a en tout cas fait bondir la Société des journalistes du magazine, qui a exprimé sa désapprobation face à ce qu’elle qualifie de « choix périlleux » susceptible de « nuire à l’image » de la publication.

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Procès d’intention ?

Si les mâchoires des historiques de “Match”‚ se crispent, c’est qu’entre les lignes de cette couverture, ils devinent l’ombre d’un nouvel actionnaire dont le groupe Vivendi déploie, depuis quelques mois, une OPA sur la direction d’Arnaud Lagardère : Vincent Bolloré…

Procès d’intention ? Primo, les origines de Robert Sarah riment avec l’intérêt du milliardaire breton pour l’Afrique de l’ouest. Secundo, la réputation « réactionnaire » et clivante du Guinéen, opposant au réformateur François, cadre avec la ligne éditoriale des autres médias “bolloriens”, comme la chaîne CNews qui le recevait, d’ailleurs, en décembre, dans « Le grand rendez-vous », émission habituellement dédiée aux politiciens français. Tertio, le portrait de Paris Match n’a pas été rédigé par la spécialiste des questions religieuses de la rédaction, Caroline Pigozzi, mais par l’écrivain-journaliste Philippe Labro, intervenant régulier de la chaîne C8, sœur low-cost de Cnews.

Alors que Vincent Bolloré est connu pour ses convictions catholiques traditionalistes et sa proximité avec les positions radicales d’Eric Zemmour, le cardinal Sarah considérait, en 2015, que « les idéologies occidentales de l’homosexualité et de l’avortement et le fanatisme islamique sont ce qu’étaient le nazisme, le fascisme et le communisme au XXe siècle ». Via l’internationale des réactionnaires, un religieux africain gratte le buzz au milieu d’une tempête idéologique franco-française…

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