Cheb Khaled : comment le roi du raï algérien est devenu marocain

Khaled, l’artiste algérien récemment installé au Maroc, vient d’être naturalisé par Mohammed VI. Retour sur les raisons d’une décision qui fait beaucoup de bruit.

Khaled au festival Mawazine de Rabat, en mai 2012. © Fadel Senna/AFP

Khaled au festival Mawazine de Rabat, en mai 2012. © Fadel Senna/AFP

Publié le 24 septembre 2013 Lecture : 2 minutes.

En quelques lignes, parues dans le Bulletin officiel du 5 septembre, un dahir (décret royal) de Mohammed VI traverse la frontière hermétiquement close entre le Maroc et l’Algérie : "[Est] naturalisé, à titre exceptionnel : M. Khaled Hadj Brahim, né le 29 février 1960 à Oran, en Algérie." Plus connu sous son seul prénom, Khaled apparaît plus que jamais comme un ambassadeur de bonne volonté entre les deux pays. En mai 2012, lors du festival Mawazine de Rabat, il était déjà apparu drapé dans les deux étendards nationaux. Et jusqu’à sa naturalisation, il était la star étrangère qui tournait le plus au Maroc.

De "Didi", son tube planétaire sorti en 1992, à l’album C’est la vie (2012), il a fidélisé un public nombreux dans le royaume. Il y joue souvent à guichets fermés – ou devant des foules, puisque ses concerts sont régulièrement gratuits. Le 18 août, deux jours avant la signature par le roi du décret de naturalisation, il était ainsi à l’affiche du festival amazigh Twiza, à Tanger.

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Depuis longtemps, comme beaucoup d’Algériens et de Marocains, Khaled se sent à l’aise de part et d’autre de la frontière et refuse de se laisser dicter son agenda par les hommes politiques des deux pays. Pour cela, il faut savoir se sortir, avec tact, de certains mauvais pas. Invité en 2008 à Dakhla, la deuxième plus grosse ville du Sahara occidental, il a finalement décliné, prétextant une maladie. Face aux tentatives de récupération de tous bords, et par médias interposés, il est en effet plus sage de prendre des distances avec le conflit sahraoui.

La naturalisation de l’artiste semble liée avant tout à des raisons privées. Son épouse, Samira, native d’Oujda – la plus algérienne des cités marocaines -, désirait depuis longtemps s’installer dans le royaume. "Elle est très stricte pour tout ce qui concerne l’éducation de nos filles. Après l’adoption de la loi autorisant le mariage gay en France, elle m’a demandé de rentrer au Maroc et nous venons de déménager", confiait le chanteur en juin à l’hebdomadaire féminin panarabe Sayidaty (propriété de la société Saudi Research and Marketing Group, qui édite aussi le journal Asharq al-Awsat).

Une amitié de vingt ans avec le roi

Khaled a ses entrées tant au palais royal de Rabat qu’à El-Mouradia, à Alger. Le "roi du raï" est un ami de Mohammed VI. Question de génération. Peu de gens le savent, mais les deux hommes se sont connus en 1989. Le futur souverain était encore prince héritier et déjà amateur de raï lorsque le chanteur s’est produit devant le public marocain à Casablanca, pour la première fois. "C’était un 30 décembre et l’événement s’appelait "Happy New Raï", se souvient l’un des organisateurs. Le prince héritier s’est rendu dans les loges pour rencontrer Cheb Khaled, alors une star montante." Depuis, la relation s’est maintenue et renforcée. "J’ai eu la chance de côtoyer le roi lorsqu’il était prince. Puis quand il est devenu roi, il ne m’a pas tourné le dos. Bien au contraire. Il n’a pas changé et ça me touche. […] Il m’invite souvent chez lui quand je suis au Maroc", déclarait Khaled dans une interview au magazine marocain TelQuel en 2009. N’en déplaise aux esprits chagrins qui y voient un coup politique, voire une trahison, Cheb Khaled est désormais algéro-marocain. Sans exclusive.

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