Chinafrique : donner un poisson ou apprendre à pêcher ?
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François Soudan
Directeur de la rédaction de Jeune Afrique.
Publié le 27 septembre 2013 Lecture : 2 minutes.
La relation sino-africaine est aujourd’hui à un tournant et il ne faudrait surtout pas s’imaginer que les dirigeants de Pékin, qui ont massivement investi depuis vingt ans dans la connaissance politique, sociologique et culturelle du continent, en sont inconscients. Inquiets des accusations de prédation qui nuisent à leur image, donc à leurs objectifs commerciaux, alarmés par l’apparition sporadique de sentiments hostiles au sein de l’opinion et soucieux de satisfaire sur le long terme leur insatiable appétit en ressources naturelles, les Chinois ont sous l’impulsion du président Xi Jinping, au pouvoir depuis six mois, entrepris de réformer le code de conduite des sociétés d’État partenaires au développement de l’Afrique.
Le chantier est vaste, mais l’objectif est clair : abolir des méthodes de moins en moins acceptées parce que relevant du capitalisme sauvage et adopter les vertus du management "normal", une conversion de toute façon inévitable dans le cadre des joint-ventures qui se multiplient entre les entreprises chinoises et occidentales. Néanmoins, Pékin entend continuer de maximiser ses atouts et son avantage comparatif : les Chinois sont moins chers que les Européens et les Américains, investissent dans des zones à risques, portent des projets ambitieux, prêtent de l’argent à des taux défiant toute concurrence et n’ont pas de passé colonial.
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Ce dernier point est essentiel : la Chine, qui ne cherche plus depuis des lustres à présenter son propre développement comme un modèle à suivre, n’a strictement aucun complexe à soutenir n’importe quel type de régime – démocratique ou non – pourvu qu’il soit stable, avec des interlocuteurs permanents, et capable d’offrir un minimum de protection à ses intérêts et à ses ressortissants. Ces derniers seraient aujourd’hui entre 500 000 et 800 000 : plus de Chinois se sont installés en Afrique subsaharienne au cours des quinze dernières années que d’Européens (Afrique du Sud exceptée) en quatre siècles !
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Reste que l’Afrique profitera vraiment de cette normalisation de la présence chinoise à une condition : que ses propres dirigeants, trop souvent victimes de leur insouciance, de leur corruptibilité ou tout simplement de leur incompétence, cessent de considérer ces nouveaux investisseurs comme les machines à sous des casinos de Macao et ne se contentent plus qu’on leur offre le poisson sans leur apprendre à pêcher (proverbe chinois). Qu’ils se mettent enfin à négocier, à faire jouer la concurrence, à exiger de vrais transferts de technologie et une qualité d’exécution irréprochable. C’est aux Africains de décider où et comment accueillir, en fonction de leurs intérêts, les investissements chinois et non pas l’inverse. À eux de savoir tirer bénéfice de l’impérieux besoin d’Afrique de la grande Chine.
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