Au bout du tunnel
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Mehdi Ba
Journaliste, correspondant à Dakar, il couvre l’actualité sénégalaise et ouest-africaine, et plus ponctuellement le Rwanda et le Burundi.
Publié le 13 septembre 2013 Lecture : 2 minutes.
Le Burundi sur la voie de l’ouverture
Si tous les tunnels comportent une sortie, certaines sont plus difficiles à atteindre. Le Burundi devra cheminer encore un peu avant d’apercevoir la lumière du jour. Au moins s’en rapproche-t-il, à son rythme, et après être revenu de loin. Au terme de décennies sanglantes, le scénario du pire a pu être évité. La normalisation politique inaugurée en 2000 par la signature des accords d’Arusha, sous les auspices de Nelson Mandela, a accouché d’un système encore imparfait, qui aura tout de même eu le mérite de tarir la source des violences ethnopolitiques. Ses grenades, mines et machettes remisées au profit de bulletins de vote, la population burundaise pouvait enfin espérer se concentrer sur son développement, encore embryonnaire.
L’équilibre n’en est pas moins précaire. Lors des élections de 2010, le pays a frôlé la rechute. Accusations de fraudes, violences électorales, départ en exil des principales figures de l’opposition. Leur retour progressif depuis le forum qui les a réunies, en mars, avec le pouvoir, ne saurait dissimuler les tensions qui persistent. Dernière hypothèque en date : la controverse tout africaine sur la constitutionnalité d’une éventuelle candidature du président Pierre Nkurunziza pour un troisième mandat, en 2015. S’il ne l’a pas encore officialisée, il a laissé entendre qu’elle n’était pas impossible…
Au chevet de ce pays convalescent, la communauté internationale oscille entre espoirs et désillusions. En octobre 2012, lors d’une conférence de donateurs à Genève, le Burundi avait obtenu une enveloppe de près de 2 milliards d’euros d’engagements pour financer son développement sur quatre ans. En contrepartie, ses responsables avaient donné des assurances en matière de démocratie et de libertés publiques. Huit mois plus tard, patatras ! La promulgation d’une loi encadrant la liberté de la presse, qui restreint notamment la protection des sources et interdit la publication de certaines informations jugées "sensibles" par le pouvoir, provoquait l’indignation de la société civile et de l’opposition, ainsi que la plus haute "préoccupation" des partenaires du pays. Au nombre des sujets tabous : la dévaluation continue du franc burundais, dont les répercussions sur les importations et, in fine, sur le coût de la vie continuent de se faire sentir. Un malheur n’arrivant jamais seul, l’incendie en janvier du marché de Bujumbura, poumon économique du pays, finissait de fragiliser l’économie, entraînant dans les trois mois qui ont suivi une diminution de 20 % des recettes de l’État.
Tributaire de l’aide internationale pour plus de la moitié de son budget, handicapé par un lourd déficit énergétique qui grève, notamment, le développement d’un secteur minier prometteur, enclavé physiquement et technologiquement, le Burundi est également montré du doigt pour sa corruption endémique, en dépit d’initiatives louables telles que la création, en 2011, d’un ministère de la Bonne Gouvernance.
Disposant d’atouts sous-exploités et d’entrepreneurs motivés, le pays, qui a progressé de treize places dans le dernier classement "Doing Business" de la Banque mondiale, ne pourra relever les défis qui se posent à lui que lorsque sa classe politique se sera définitivement désintoxiquée du poison de la division et de la peur hérité des années sombres.
Lorsque le pouvoir est un but ultime et non un moyen d’agir, le pire n’est jamais loin. Plus proche, en tout cas, que le bout du tunnel.
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