Algérie : quand l’APS mêle Jeune Afrique à d’obscurs complots
L’Agence Algérie Presse Service relaie de fausses informations sur notre média. Objectif : laisser entendre que Jeune Afrique nourrit le sombre dessein de nuire à l’Algérie.
Ce 11 juillet, dans un article titré « Le détenu Benhalima révèle les liens étroits entre le terroriste Boukhors et le Makhzen marocain », l’Agence officielle Algérie Presse Service (APS) se fait le relais de prétendus « aveux » de l’ex-caporal de l’armée algérienne Mohamed Benhalima, diffusés le soir même sur la chaîne nationale algérienne.
Cet ancien officier de 32 ans, passé en Europe après sa participation au Hirak en 2019, s’était fait connaître par des vidéos dans lesquelles il dénonçait plusieurs scandales liés au pouvoir algérien. Condamné par contumace, en mars 2021, à 10 ans de prison pour « publications de fausses informations », il avait été arrêté en Espagne puis extradé vers l’Algérie.
Il est également accusé par Alger d’appartenir au mouvement islamiste Rachad, considéré comme terroriste en Algérie. Son extradition avait soulevé l’indignation d’Amnesty International qui avait appelé Madrid à renoncer immédiatement à son expulsion. En vain.
Paranoïa
Les craintes de mauvais traitements de l’ONG n’étaient pas exagérées, puisque celui qui est désormais détenu en Algérie fait l’objet d’une série de la télévision nationale mettant en scène ses « aveux », selon des méthodes héritées d’un autre temps.
Depuis l’élection du président Abdelmadjid Tebboune en décembre 2019, une véritable chape de plomb s’est abattue sur l’Algérie, toute contestation ou critique du pouvoir étant assimilée à un « complot » par des autorités qui ont fait de la paranoïa un mode de gouvernance.
Dans ce contexte, les « aveux » du caporal Benhalima sont au minimum sujets à caution. Nos journalistes ont donc lu d’un œil distrait le compte rendu de ces aveux par l’APS. Avant de tomber sur une mention de notre média.
« (Benhalima) a également dévoilé la relation qu’entretient le terroriste Amir Boukhors avec un journaliste marocain dénommé Ahmed Gharabi, travaillant pour le compte du journal « Jeune Afrique » et auteur d’un article à son sujet en janvier 2021, en plus des relations qu’il entretient avec des partis influentes (sic) en France, par le biais de son avocat juif qui, selon Benhalima, lui aurait demandé de payer 10 000 euros pour faciliter l’obtention de l’asile politique en France », peut on ainsi lire sur l’Agence de presse officielle.
Celui que l’APS dépeint en « terroriste », Amir Boukhors, n’est autre qu’« Amir DZ ». Installé en France, Amir DZ, 38 ans, est très actif sur les réseaux sociaux où il publie des vidéos et des informations supposément compromettantes contre des dirigeants et des personnalités algériennes.
En 2018, il avait été condamné en Algérie à trois ans de prison ferme pour « extorsion de fonds », « chantage », « menaces » et « diffamation à travers les réseaux sociaux ». En 2019, il avait été entendu par la justice française sur la base de sept mandats d’arrêts délivrés par un juge algérien avant d’être relâché.
Fake news caractérisée
L’APS ne craint pas le ridicule en diffusant ce qu’il faut bien appeler une fake news caractérisée. Amir DZ n’est en contact avec aucun de nos journalistes et aucun journaliste marocain du nom d’Ahmed Gharabi n’a travaillé pour notre média. Il suffit, pour s’en convaincre, d’une recherche sur Google. Une tâche manifestement hors de portée des journalistes de l’APS.
De même, une courte recherche aurait permis à nos confrères de constater qu’aucun article sur Amir DZ n’a été publié sur notre site en janvier 2021. Nous avons notamment évoqué le cas de ce blogueur dans un article de mars 2021, signé de notre journaliste Farid Alilat. Nous le repartageons ici.
Si les autres aveux de l’ex-caporal Benhalima sont du même tonneau, gageons qu’ils ne convaincront pas grand monde.
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