RDC : Pascal Maître, made in Kin
Kinshasa a donné beaucoup d’artistes à l’Afrique et au monde. C’est à eux que le photographe Pascal Maitre, qui parcourt le continent depuis plus de trente ans, consacre son exposition présentée au festival Visa pour l’image.
Julie Djikey s’est enduit le corps d’un mélange d’huile pour moteur et de cendres de pneus brûlés. Des filtres à huile lui font office de soutien-gorge. Cette artiste qui vit à Kinshasa a voulu se transformer en "voiture humaine" afin de protester contre la pollution, le réchauffement climatique et l’utilisation des produits cosmétiques. Son portrait ouvre l’exposition de Pascal Maitre, présentée au 25e festival international du photojournalisme Visa pour l’image, à Perpignan, dans le sud de la France, jusqu’au 15 septembre.
Le photographe français a capturé, en une quarantaine de clichés, l’énergie débordante de la capitale de la RD Congo, avec ses artistes peintres, ses sculpteurs, ses musiciens d’orchestres symphoniques… Tous puisent leur inspiration dans le quotidien de Kinshasa, une mégapole de 10 millions d’habitants où chaos et traditions demeurent les maîtres mots. "J’avais déjà travaillé sur cette ville, il y a dix ans, pour le magazine Géo. Mais cette fois, je voulais raconter l’histoire de ses artistes. Pourquoi Kinshasa en a-t-elle donné autant ? s’interroge Pascal Maitre devant les panneaux de son exposition. Ils comptent souvent parmi les plus connus d’Afrique et du monde."
Traditions congolaises et art contemporain
Sur les photographies colorées, on découvre le sculpteur Bodys Isek Kingelez, qui imagine des villes à l’architecture opposée de celle, anarchique, de Kinshasa, et en réalise les maquettes à partir de matériaux de récupération. Un peu plus loin, Chéri Samba, l’un des plus célèbres peintres africains, pose dans un costume rose fluo, tandis que des "sapeurs" – qui ont tendance à attirer les objectifs de nombreux photographes tant occidentaux qu’africains – exhibent noeuds papillons, vestes à carreaux et chaussures Weston. Pascal Maitre n’hésite pas à mêler les traditions congolaises à l’art contemporain de la ville, et clôt son reportage par des photographies de groupes ethniques, de catcheurs – le catch étant le sport le plus populaire après le football – et des images de scènes d’exorcisme impliquant des enfants accusés de sorcellerie. "Kinshasa est unique, il n’y a pas un endroit au monde comme ça", s’exclame le grand reporter de 58 ans, qui parcourt le continent africain depuis plus de trente ans.
C’est au sein de la rédaction de Jeune Afrique, en 1978, qu’il a découvert le continent, après avoir abandonné ses études de psychologie. Il en capture ses premières images lors de reportages. Trois ans plus tard, il quitte le magazine, mais l’Afrique lui reste chevillée au corps. Et elle lui offrira les souvenirs les plus marquants de son travail : la guerre en Somalie – où il s’est rendu une dizaine de fois en dix ans – et la famine en Éthiopie, d’où il est revenu "avec une grande colère et un sentiment d’impuissance". Des situations qu’il n’est d’ailleurs pas toujours facile de montrer… "Tout le monde sait jouer avec un ballon, mais tout le monde n’est pas un professionnel. Avec la photo, c’est la même chose", insiste Pascal Maitre, qui participe pour la septième fois au festival, à Perpignan. "Mais je n’ai pas seulement exposé sur l’Afrique !" tient-il à préciser. Il est de ceux qui ont côtoyé le commandant Massoud en Afghanistan, parcouru les steppes de Sibérie, vécu plusieurs mois aux côtés des guérilleros colombiens, affronté la violence des rues de São Paulo. Actuellement, il travaille sur le fleuve Congo pour National Geographic. "L’Afrique est un continent où il y a toujours des histoires immenses et incroyables à raconter."
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