Pouvoir à durée (in)déterminée
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Marwane Ben Yahmed
Directeur de publication de Jeune Afrique.
Publié le 9 septembre 2013 Lecture : 2 minutes.
"Mieux vaut partir cinq ans trop tôt que cinq minutes trop tard", disait le général de Gaulle. Les chefs d’État africains, mais aussi les autres acteurs politiques du continent, opposants au long cours compris, peuvent toujours méditer ce précepte. Ce n’est pas nouveau : sous nos cieux, l’accession au pouvoir comme la manière de le quitter sont le plus souvent régies par l’arbitraire, les rapports de force et l’argent. Finir ses jours sous les ors d’un palais n’est pas le fantasme des seuls monarques. Le continent change ? C’est vrai, notamment en Afrique de l’Ouest et en Afrique anglophone, où les alternances se sont multipliées ces dernières années (Bénin, Ghana, Sénégal, Niger, Côte d’Ivoire, Zambie, Cap-Vert, Guinée, São Tomé, Botswana, etc.). Attention cependant, le vent tourne vite, et la supposée vigilance des grandes puissances, qui disent veiller au grain, est surtout fonction de leurs intérêts.
Les toutes prochaines années en diront beaucoup sur nos "démocraties", mais aussi sur la capacité de nos chefs à savoir s’arrêter à temps, a fortiori quand ce sont leurs Constitutions, et non leur longévité au pouvoir, sans parler de leur état de santé, qui les y obligent. Premiers de cordée, le Burkinabè Blaise Compaoré et le Burundais Pierre Nkurunziza, dont le dernier mandat s’achève dès 2015. Leur choix pourrait d’ailleurs influer sur celui de leurs homologues également concernés : Joseph Kabila, Denis Sassou Nguesso et Thomas Boni Yayi en 2016, ou Paul Kagamé l’année suivante. Les scénarios sont connus d’avance. Courtisans, plumitifs, intellectuels, parti présidentiel ou alliés, et associations de masse appelleront le chef de l’État à jouer les prolongations. Pour achever ses chantiers si prometteurs ou pour accompagner quelque temps encore des populations qui ne sauraient être abandonnées à leur sort dans des circonstances si préoccupantes. Pour conserver leurs privilèges, conseillers, ministres, amis, parents et autres thuriféraires ne manqueront pas de lui seriner que le pays a encore besoin de lui. Ceux, plus audacieux, qui auront l’outrecuidance de tenter de le persuader qu’il est temps de passer la main seront le plus souvent écartés comme des malpropres.
Les avocats du diable oublient qu’aucun président n’est irremplaçable, trahissant au passage le legs d’un Nelson Mandela qu’ils ne se privent pourtant pas de citer à l’envi, et, surtout, ne se rendent même pas compte que leurs discours ne portent plus au sein de populations de plus en plus lucides et vigilantes. Les règles sont faites pour être respectées et la démocratie ne peut s’épanouir – et s’enraciner – que lorsque le pouvoir politique est librement et régulièrement transmis. Puissent ces dirigeants éclairés faire le bon choix…
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