Richard Nixon : grossier, raciste, antisémite
La publication d’enregistrements réalisés à la Maison Blanche en 1973 montre un Richard Nixon paranoïaque, ordurier, antisémite et raciste.
Richard Nixon a dû s’en mordre les doigts. Il avait fait installer, en février 1971, un système secret d’enregistrement à la Maison Blanche (dont sept micros dans le Bureau ovale) pour constituer des archives personnelles de ses conversations et appels téléphoniques à des fins historiques. Or non seulement ces enregistrements, une fois leur existence révélée, ont contribué à sa chute, mais leur publication a encore terni l’image déjà peu flatteuse du seul président des États-Unis à avoir démissionné (le 9 août 1974).
"Pas de juifs, nous en avons assez" "Les Noirs sont incapables de gouverner"
Depuis 2009, plus de trois mille heures de conversations ont été déclassifiées. On y découvre un dirigeant paranoïaque, brusque, au langage souvent ordurier. Et la dernière livraison, provenant d’enregistrements réalisés entre le 9 avril et le 12 juillet 1973, ne fait pas exception. Elle rappelle notamment l’antisémitisme de Nixon, déjà perceptible dans des bandes rendues publiques ces dernières années. En avril 1973, parlant à son conseiller à la sécurité nationale, Henry Kissinger – lui-même juif -, d’un sommet entre les États-Unis et l’Union soviétique, il dit ainsi craindre que les Juifs ne ruinent ses efforts car ils placent "leur propre intérêt avant celui des Américains". Quelques mois plus tard, discutant de nominations dans le domaine judiciaire avec l’un de ses conseillers, il lui donne cette consigne : "Pas de Juif, est-ce clair ? Nous en avons assez. Mais si vous en trouvez un extraordinaire, prenez-le."
Le président est en effet coutumier des propos racistes. Pointant le manque de bonne gouvernance en Jamaïque, il estime que "les Noirs en sont incapables. Nulle part. Et ils ne seront pas en mesure de le faire avant une centaine d’années, peut-être même un millier… Connaissez-vous un "pays noir" qui a été bien géré ?".
Artisan du rétablissement des relations avec la Chine et de la détente avec l’Union soviétique, Nixon était pourtant, en privé, peu diplomate. Sur les enregistrements, on l’entend notamment qualifier Willy Brandt, le chancelier ouest-allemand, d’"imbécile". Et s’il estime que les Chinois sont le "peuple le plus compétent de la planète", c’est pour mieux les comparer aux Russes, qui "bavent quand on les flatte". Ce qui ne l’empêchera pas de cultiver une franche camaraderie avec son homologue soviétique, Leonid Brejnev. Parmi les bandes rendues publiques figure leur entretien en tête à tête (avec un interprète) du 18 juin 1973, à la veille d’un sommet historique. "Si nous décidons de travailler ensemble, nous pouvons changer le monde", déclare notamment Nixon lors de cette conversation, dont l’ambiance semble amicale.
Scandale du Watergate
Mais c’est naturellement le scandale du Watergate, à l’époque en plein développement, qui constitue le morceau de choix des enregistrements. Ils montrent la colossale erreur de jugement de Nixon sur son ampleur. Fin avril 1973, le président annonçait le départ de quatre de ses proches conseillers dans son premier discours télévisé sur l’affaire. Le premier et le dernier, croyait-il alors : "Je ne parlerai plus jamais de ce fils de pute de Watergate. Jamais, jamais, jamais, jamais !" Les bandes révèlent également qu’après ce discours, il a reçu des appels de deux futurs présidents, George Bush (père) et Ronald Reagan. "Vous êtes dans nos prières", lui a déclaré ce dernier, alors gouverneur de Californie.
Néanmoins inquiet, Nixon avait ordonné, le 18 avril, à son chef de cabinet de détruire l’essentiel des enregistrements. Ce qui ne fut pas fait. Le 16 juillet 1973, l’existence du système d’écoutes était révélée lors d’une audition de la commission d’enquête du Sénat. Deux jours plus tard, les micros étaient débranchés. Trop tard.
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