Soumaïla Cissé accepte sa défaite en gentleman

Publié le 27 août 2013 Lecture : 2 minutes.

"Messieurs des gardes françaises, tirez les premiers !

– Monsieur, faites tirer vous-mêmes ; nous ne commençons jamais !"

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Cet échange de politesses entre l’Anglais Milord Hay et le comte d’Auteroche, un Français, lors de la bataille de Fontenoy, en 1745, montre que, même dans la guerre, on peut faire montre de civilité. Il en va de même dans les compétitions électorales. Si dans les vieilles démocraties d’Europe et d’Amérique il est de coutume que les perdants reconnaissent leur défaite, en Afrique, c’est plutôt rare.

L’attitude de Soumaïla Cissé, qui dès le 12 août a reconnu sa défaite et s’est rendu chez Ibrahim Boubacar Keïta pour le "féliciter", est donc entrée dans les annales africaines. Ce geste a suscité de nombreux commentaires, pour la plupart laudateurs. Sur le continent, les perdants nous ont plutôt habitués à contester bruyamment des "hold-up électoraux". On a souvent vu aussi des candidats incapables de se faire élire député dans leur propre circonscription se plaindre d’avoir été spoliés d’une victoire à la présidentielle !

Soumaïla Cissé avait dénoncé une "main invisible" qui aurait tout planifié pour légitimer par les urnes le choix de l’armée, des imams et de "l’étranger", et tout laisse à penser qu’il a accepté les résultats de l’élection plus par résignation que par conviction. Toutefois, lorsque par des sources concordantes l’écho de la défaite vous parvient, mieux vaut anticiper et s’investir dans un travail symbolique pour en minimiser l’impact.

Si Soumaïla Cissé a tenu à aller saluer son aîné et lui souhaiter bonne chance alors que son entourage avait dénoncé des fraudes, c’est qu’il a compris tout le bénéfice qu’il pouvait en tirer. Non seulement cette leçon de fair-play permet de réduire la polarisation politique, mais aussi de redorer l’image du Mali. Toutes choses qui seront portées au crédit du perdant. Dans un pays où les tensions sont encore vives, Cissé ne pouvait ignorer qu’il forcerait l’admiration.

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Il sait bien aussi qu’il faudra panser les plaies d’un pays déchiré par une crise politico-militaire, et que contester sa défaite l’aurait fait paraître comme un fauteur de troubles. Ç’aurait été brouiller l’image du "sérieux" Cissé. En mettant "l’intérêt du Mali" au-dessus de l’intérêt partisan, il apporte donc sa contribution à la réconciliation nationale. Il aide aussi à donner une autre image du Mali : celle d’un pays de fraternité, de tolérance et de civilité politique, qui renoue avec les chemins d’une démocratie accidentellement dévoyée. Cissé sait enfin qu’en s’inclinant il conserve ses chances pour le futur. Dans un pays où le jeu politique est relativement ouvert, il est possible de tenter sa chance la prochaine fois. Mieux valait faire fructifier son capital symbolique plutôt que de le dilapider en passant pour un mauvais perdant.

>> Lire aussi : Cissé, Wade, Banda… Les bons perdants des élections en Afrique

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