Russie – France : entre Macron et Lavrov, un tango virtuel en Afrique

La simultanéité des voyages africains du chef de la diplomatie russe et du président français relève de la coïncidence de calendrier. Mais les séjours ne sont pas sans lien…

© Damien Glez

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Publié le 26 juillet 2022 Lecture : 2 minutes.

À vol d’oiseau, Paris et Moscou sont séparés de 2 486 kilomètres. Ce lundi 25 juillet, il n’y avait pourtant que 949 kilomètres entre Emmanuel Macron et Sergueï Lavrov. En début de soirée, le premier atterrissait à Yaoundé, siège de la présidence camerounaise occupée par Paul Biya, tandis que le second se trouvait à Oyo, fief congolais de Denis Sassou Nguesso. Entre le Cameroun et le Congo-Brazzaville se déploie une longue frontière, où les deux visiteurs européens auraient pu s’effleurer…

Rapprochement géographique

Mais l’occasion ne fait pas les larrons. Chacun s’échine à éviter, autant que possible, une allusion à l’invité du pays voisin. Venu d’Égypte, le Russe ne s’attarde pas avant de rallier l’Ouganda et l’Éthiopie. Quant au Français, ses bagages n’ont guère été déballés, avant les escales béninoise et bissau-guinéenne. Pourtant, si les deux hommes ne se rencontrent pas sur le sol africain, leurs agendas se croisent bien sur un point : la crise alimentaire induite notamment du conflit ukrainien, les perspectives de nouveaux partenariats agricoles et l’annonce de « couloirs sécurisés » pour l’exportation des céréales prisées par l’Afrique. Un thème qui implique des effets commerciaux et des campagnes de séduction géopolitique…

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En on, tandis que Lavrov se révèle laconique et presque monomaniaque sur les thèmes évoqués, le disert Macron déploie nombre de sujets dont on sait qu’il est illusoire de vouloir les traiter tous en si peu de temps : les investissements des entreprises françaises, la lutte contre le terrorisme, la gouvernance ou encore l’État de droit, au moment où le président hôte s’apprête à fêter quarante ans de pouvoir et 90 ans d’âge.

Fossé diplomatique

En off, les oreilles du Russe et du Français pourraient bien siffler, tant la lutte d’influence que se livrent la France et la Russie, sur le territoire africain, fait couler encre et salive. Si le bras de fer concerne directement le Cameroun – en plein conflit ukrainien, Paul Biya a envoyé son ministre de la Défense à Moscou –, le ndolé camerounais et le saka-saka congolais pourraient avoir un arrière-goût de tiguadèguè sahélien. Si Emmanuel Macron entend rénover ses partenariats militaires sur le continent, il sait que la compétition stratégique avec Moscou a trouvé, au Sahel, l’abcès de fixation synonyme, pour Paris, de perte d’influence, voire d’humiliation.

De ce point de vue, après la proximité géographique du Russe et du Français sur le sol d’Afrique centrale, les séjours béninois et bissau-guinéen de Macron seront une manière de cerner la crise sécuritaire voisine, qui rime notamment avec opérations informationnelles russes et présence à peine avouée d’un groupe paramilitaire Wagner plus ou moins reconnu par Moscou, mais bête noire manifeste de certaines voix françaises. À chaque pays africain visité, en fonction de la personnalité de ses dirigeants, de décider s’il se sent flatté d’être courtisé par deux puissances majeures ou stressé d’être sous leur pression…

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