Athéisme sans frontières

Fawzia Zouria

Publié le 7 août 2013 Lecture : 2 minutes.

Après « le mariage pour tous », pourquoi pas « l´athéisme pour tous » ? C´est ce que suggérerait l´intitulé de la dernière-née des associations des musulmans de l´Hexagone. Pardon, des « ex-musulmans », puisque ce collectif se fait appeler Ex-Musulmans athées de France. De mon point de vue, une telle initiative a le mérite d´exister pour plusieurs raisons. Elle dénonce le fait que l´athéisme soit considéré en terre d´islam comme un crime et que la liberté de conscience y reste bannie. Elle remet en question le postulat selon lequel toute personne née d´un père musulman est musulmane d´office et ne peut s´affranchir de cette foi ni se convertir à une autre religion. Elle dépasse la peur de parler en dehors de la religion et de réfléchir contre elle.

Toutefois, l´association a tort sur plusieurs points. Son intitulé, d´abord. Pourquoi « ex-musulmans » ? On peut rompre avec la foi islamique sans cesser d´être musulman par l´histoire et la culture. Confondre croyance et identité culturelle, réduire les musulmans à leur religion, c´est faire le jeu des islamistes. Et pourquoi « athées de France », alors que l´athéisme est un droit en République et une philosophie admise et reconnue ? Il aurait été plus cohérent de préciser que le combat est à mener dans les pays musulmans en particulier. En formulant officiellement une revendication qui a trait au rapport intime à la foi, le collectif fait passer la religion du domaine du privé à l´espace de la cité. Et, là encore, il risque d´abonder dans le sens des religieux. Enfin, proclamer ostensiblement la sortie de l´islam peut laisser entendre qu´il s´agit non seulement de rompre avec cette religion, mais aussi d´en faire un ennemi et de flirter avec l´islamophobie.

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Voilà mon sentiment personnel. Pour ce qui est des réactions qui ont accueilli l´association dans les médias et sur le Net, elles ont été nombreuses et contrastées, on s´en doute. Il y a eu les félicitations des amoureux de la liberté de penser. Les bravos saluant le courage des premiers musulmans de l´Histoire à se fâcher avec Allah sans avoir un verre dans le nez, ni la raison qui chavire. Les craintes des sympathisants pour la vie de ces héros rebelles : « Est-ce que leurs parents sont au courant ? », comme si ces derniers s´apprêtaient à se faire hara-kiri ou à afficher leur homosexualité (sic). À l´opposé, les critiques ont vu en ces militants des apostats, bien sûr, des mécréants, des frustrés, des fanatiques, des agents d´Israël, des suppôts de l´Occident… La théorie du complot, quoi ! Les sceptiques, quant à eux, ont dit déceler dans cette entreprise un mélange de courage et de désinvolture, d´honnêteté et de provocation, d´esprit de liberté et de tentation du pugilat. Enfin, il y a les ex-frères de ces athées, adeptes d´un islam tolérant qui, au lieu de leur jeter la pierre, ont choisi de prier pour qu´Allah remette ces brebis égarées dans le droit chemin et fasse qu´ils réintègrent un jour le giron de la communauté au sein d´une Association des ex-athées musulmans.

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