Samantha Power en première ligne à l’ONU

Journaliste et pasionaria des droits de l´homme, Samantha Power dénonçait l´inaction des politiques face aux génocides. Dès sa confirmation par le Sénat comme ambassadrice à l´ONU, ce sera à elle de jouer.

Samantha Power devant la Commission des affaires étrangères du Sénat, le 17 juillet. © Karen bleier/AFP

Samantha Power devant la Commission des affaires étrangères du Sénat, le 17 juillet. © Karen bleier/AFP

ProfilAuteur_JeanMichelAubriet

Publié le 1 août 2013 Lecture : 3 minutes.

Pressentie pour devenir l´ambassadrice des États-Unis auprès des Nations unies, Samantha Power, 42 ans, connaît mieux que personne le sens de l´injonction « plus jamais ça ! » rituellement lancée après un génocide : elle en a fait le leitmotiv de toute sa vie.

Née en Irlande, où sa mère était championne de squash, cette rousse flamboyante s´est installée aux États-Unis avec sa famille à l´âge de 9 ans. Elle devient vite une fan des Red Sox, l´équipe de baseball de Boston, entreprend une carrière de journaliste et, en 1993, est chargée de couvrir la guerre dans les Balkans. Elle a 23 ans, sa vie bascule.

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Dans cette Europe où, après la Seconde Guerre mondiale, de telles atrocités étaient censées être proscrites à jamais, elle est confrontée à l´horreur. À Srebrenica notamment, 8 000 musulmans sont massacrés par les Serbes de Bosnie… En 2002, hantée par cet épisode, cette diplômée de Yale écrit un livre, A Problem from Hell, récompensé par le prix Pulitzer, dans lequel elle dénonce la frilosité des États-Unis face aux génocides. Que ce soit au Cambodge, en Bosnie ou, bien sûr, au Rwanda. Ainsi, pendant les trois mois que dura le génocide des Tutsis, l´administration Clinton ne consacra à la tragédie aucune réunion de haut niveau… Le livre s´ouvre d´ailleurs sur les vains efforts de l´ambassadeur américain en Turquie, en 1915, pour tenter de mettre un terme au génocide des Arméniens. En 2004, elle fut aussi l´une des premières journalistes à couvrir le nettoyage ethnique au Soudan. Partie du Tchad, elle parvint à gagner les zones du Darfour tenues par les rebelles…

Une conseillère des droits de l’homme écoutée par Barack Obama

Mariée depuis 2008 à un professeur de droit, Samantha Power est désormais à la place de ceux dont elle fustigeait naguère l´inaction : elle est depuis 2009 la conseillère pour les droits de l´homme du président Obama. Après l´avoir débarquée un peu brutalement de son staff de campagne en 2008 – n´avait-elle pas qualifié Hillary Clinton de « monstre » ? -, ce dernier est résolu à en faire son ambassadrice à l´ONU, en remplacement de Susan Rice, nommée conseillère pour la sécurité nationale.

Indiscutablement, Power a l´oreille du président. Aux côtés de Rice et de Clinton, elle est par exemple parvenue à le convaincre d´intervenir en Libye, en 2011. Puis de créer un Bureau pour la prévention du génocide et des atrocités criminelles, qui se réunit une fois par mois à la Maison Blanche. C´est ce bureau qui a notamment incité Obama à évoquer avec Thein Sein, le président birman, les persécutions qui se multiplient dans son pays contre les musulmans. Et à renforcer la traque de l´Ougandais Joseph Kony, chef sanguinaire de l´Armée de résistance du Seigneur.

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Si elle est confirmée par le Sénat, cette passionaria des droits humains va donc se retrouver propulsée en première ligne. Notamment en Syrie, où la guerre civile a déjà fait plus de 100 000 morts, et où, plus qu´ailleurs, rôdent les spectres du Rwanda et de la Bosnie. Pour l´instant, elle s´est abstenue de s´exprimer publiquement, ce qui, sans doute, reflète le malaise qui prévaut à la Maison Blanche à ce propos. L´administration s´est récemment résolue à acheminer des armes aux rebelles, mais semble avoir renoncé à toute intervention d´envergure. Le Pentagone vient d´ailleurs d´exposer devant le Congrès le coût – exorbitant – de toutes les options envisagées en Syrie : formation des rebelles, zone de non-survol, frappes aériennes, etc. Power, qui en 2003 s´était opposée à la guerre en Irak, saura-t-elle faire bouger les lignes au Conseil de sécurité, toujours paralysé par les veto russe et chinois ?

Elle devra en tout cas se familiariser avec les moeurs policées de la diplomatie. Lors de son audition au Sénat, Power a affirmé son intention de combattre la mise au pas de la société civile dans certains pays comme le Venezuela, suscitant aussitôt l´ire du président Nicolás Maduro et portant un coup d´arrêt au timide réchauffement des relations entre les deux pays. Pour madame l´ambassadrice, c´est un autre métier qui rentre.

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