Israël : un prisonnier classé X

Rendue célèbre pour avoir abrité jusqu’à son suicide l’ex-agent du Mossad Ben Zygier, la prison d’Ayalon détiendrait un second espion, coupable de haute trahison.

L’ex-agent du Mossad, Ben Zygier, était déjà prisonnier classé X. © WILLIAM WEST / AFP

L’ex-agent du Mossad, Ben Zygier, était déjà prisonnier classé X. © WILLIAM WEST / AFP

perez

Publié le 26 juillet 2013 Lecture : 3 minutes.

Il est juif, israélien, soumis depuis des années à un régime d’isolement total, et n’aurait droit qu’à une brève promenade quotidienne, seul, dans une petite cour ceinturée par un mur de béton. Dans sa cellule sans fenêtre, chacune de ses gesticulations est épiée jour et nuit par des caméras de surveillance qui, à défaut de veiller à une impossible évasion, doivent prévenir toute tentative de suicide du détenu. Telles sont les maigres informations rendues publiques sur le nouveau « prisonnier X » détenu par l’État hébreu et dont le fichier aux mains des autorités pénitentiaires ne comporterait ni nom ni photographie d’identité.

Le 8 juillet, c’est en publiant un rapport sur la mort de l’ex-agent du Mossad Ben Zygier, retrouvé pendu dans la prison sécuritaire d’Ayalon en décembre 2010, que le ministère israélien de la Justice a révélé l’existence d’un cas similaire. « Les matériaux recueillis par l’enquête recoupent les procédures spécifiques appliquées dans les dossiers de l’ancien interné de la section 15 [Ygal Amir, l’assassin du Premier ministre Itzhak Rabin] et démontrent qu’un second prisonnier est détenu dans la section 13 », a déclaré le procureur chargé de l’affaire Zygier.

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Avigdor Feldman, l’avocat qui lui avait rendu visite deux jours avant qu’il ne commette l’irréparable, a confirmé l’existence d’un « prisonnier X2 », sans toutefois divulguer de détails sur son sort. Pour cet expert du renseignement, les détenus classés « X » ont généralement trois traits communs : « Ils sont israéliens, ils travaillaient dans des institutions liées à la sécurité et dont les activités sont couvertes par le secret, et leur détention témoigne de l’échec de ces institutions, qui n’ont pas été capables d’empêcher les délits pour lesquels ces agents sont détenus. »

Des charges très graves gardées sous silence

Comme lors des révélations sur Ben Zygier, dont l’identité australienne avait servi de couverture à ses activités d’espionnage, l’affaire du « prisonnier X2 » n’est pas passée sous silence dans la classe politique israélienne. À gauche, plusieurs personnalités ont fustigé les pratiques d’un « État policier », tandis que la très combative députée du parti Meretz (socialiste) Zehava Gal-On a pointé un doigt accusateur en direction du ministre de la Sécurité intérieure, Itzhak Aharonovitch, accusé de s’être livré devant la Knesset (le Parlement) à un « compte rendu mensonger » en affirmant, il y a quelques mois, qu’aucun autre « prisonnier X » ne figurait dans les geôles israéliennes.

« Leurs droits sont respectés, s’est défendu l’intéressé. Il n’y a pas de directives sombre et secrète en Israël. Tout se fait sous la supervision des autorités judiciaires compétentes et en coordination avec elles. Tout est entrepris avec la plus grande préoccupation pour la sécurité d’Israël, une préoccupation qui oblige parfois à des activités clandestines. » En retrait depuis l’ouverture de son procès pour fraude et abus de confiance, l’ancien chef de la diplomatie israélienne Avigdor Lieberman est monté au créneau pour dénoncer le « non-sens » que représentait une telle polémique face à une affaire « extrêmement sérieuse ».

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Car, d’après des sources proches du dossier, si Ben Zygier avait été emprisonné pour avoir livré au Hezbollah le nom de plusieurs informateurs du Mossad agissant au Liban, les faits reprochés au détenu « X2 » seraient infiniment plus graves. « Je n’imaginais pas qu’un citoyen israélien pouvait commettre de tels méfaits contre son pays », confie Avigdor Feldman. Les parents du prisonnier, qui partageraient ce lourd secret d’État, se seraient résolus à garder le silence de crainte que les restrictions imposées à leur fils ne soient davantage durcies. Ils sont étroitement surveillés par les services de sécurité du Shabak.

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