Le paradoxe malien

MARWANE-BEN-YAHMED_2024

Publié le 22 juillet 2013 Lecture : 2 minutes.

Les vingt-sept candidats à la présidentielle du 28 juillet sont unanimes : le Mali est à reconstruire intégralement, des fondations au plafond. Triste diagnostic s’agissant d’un pays jadis présenté comme un parangon de démocratie et de stabilité en Afrique ! C’était une autre époque ? Sans doute, mais il n’empêche : beaucoup d’entre nous se sont fourvoyés. Nous aurions dû déceler les signes avant-coureurs de la catastrophe : corruption, siphonnage systématique des deniers publics, multiplication des nouveaux riches, vulnérabilité de l’État face aux pressions extérieures – celles de Kadhafi et de ses pétrodinars comme celles des institutions internationales, des Chinois ou des narcotrafiquants. Nous avons cru à la paix et au consensus, alors que l’un et l’autre se sont révélés illusoires. Nous avons cru aux hommes providentiels et à l’Alliance pour la démocratie au Mali (Adema), cette matrice quasi unique de la vie politique. Nous avons cru que l’influence de l’ancienne puissance coloniale était moins lourde ici qu’ailleurs sur le continent. Et que l’armée était impeccablement républicaine. Tout cela était trop beau pour être vrai.

Qui est responsable de cette fuite en avant transformée au fil des années en une sidérante chute libre ? Directement ou non, tout le monde. Davantage, peut-être, que les autres candidats, ces trois ténors supposés de la présidentielle – à moins que nous nous trompions une nouvelle fois ! – que sont Ibrahim Boubacar Keïta (68 ans), Soumaïla Cissé (63 ans) et Modibo Sidibé (60 ans) sont comptables de cet échec. Parce qu’ils ont occupé les plus hautes fonctions à la tête de l’État. Parce qu’ils n’ont pas voulu, pas pu ou pas su. Ou, tout simplement, parce qu’ils se sont tus. C’est le paradoxe de ce pays qui n’a plus d’autre choix que celui de la refondation totale. Le Mali est à réinventer, rien ne devra plus être comme avant.

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Hormis quelques irresponsables proputschistes, sanogolâtres, démagogues ou opportunistes, et un chapelet de quadras qui n’ont guère de chances de l’emporter, les électeurs n’ont point de nouveaux visages vers lesquels se tourner. Ils devront faire du neuf avec du vieux. Éternel dilemme africain : les vieilles calebasses font-elles les meilleurs ragoûts ? Ou, plus diplomatiquement, est-on mieux placé pour changer un système lorsqu’on en connaît tous les rouages et toutes les carences ? Mais, à l’inverse, la « virginité » politique garantit-elle le succès ? Bouteflika ou Morsi ? Biya ou Boni Yayi ? Le débat est ouvert.

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