Égypte : Tamarod contre Goliath

À l’origine de la chute de Mohamed Morsi, en Égypte, un mouvement de la société civile, Tamarod. Son fait d’armes : une pétition réclamant l’organisation d’une présidentielle anticipée.

Un passant signe le formulaire de Tamarod.

Un passant signe le formulaire de Tamarod.

Publié le 12 juillet 2013 Lecture : 2 minutes.

Tamarod. « Rébellion », en arabe. Ou l’histoire incroyable de quelques jeunes qui, en moins de trois mois, ont fait chuter le premier président démocratiquement élu de l’Égypte. Rien ne les destinait à une notoriété si rapide. Si les principaux responsables du mouvement sont engagés politiquement – l’un est membre du parti de Mohamed el-Baradei, d’autres militent au Courant populaire du nassérien Hamdeen Sabahi -, aucun n’exerce de responsabilités, même locales.

L’idée de la campagne a émergé il y a quelques mois lors d’une discussion entre cinq jeunes, mécontents de la gestion du pays par les islamistes, Mohamed Abdel-Aziz (ingénieur), Mahmoud Badr, Hassan Shahin, Mohamed Hekal (tous trois journalistes) et May Wahba (chercheuse et journaliste). « Nous cherchions une idée qui permette à la révolution de sortir des lieux où elle était née, comme la place Al-Tahrir au Caire, qui la propage dans les villages et les rues, raconte Badr, 28 ans. L’un d’entre nous a alors proposé : "Et si nous retirions notre confiance à Morsi ?" » Le 22 avril, l’initiative était née.

la suite après cette publicité

Pendant deux mois, les militants sillonnent le pays, proposant aux citoyens de signer un formulaire affirmant qu’ils retirent leur confiance au chef de l’État et souhaitent l’organisation d’une présidentielle anticipée. Objectif : réunir 15 millions de signatures, pour excéder le nombre de voix – 13 millions – ayant porté Mohamed Morsi à la tête du pays. Les formulaires sont imprimés avec l’aide de membres de partis politiques ou de particuliers fortunés qui mettent à disposition leurs photocopieuses et leurs ordinateurs. L’homme d’affaires Naguib Sawiris a d’ailleurs révélé avoir fait partie de ces bienfaiteurs, précisant que « Tamarod n’était même pas au courant ». Impliqués à plein temps dans la campagne, ses membres ne sont rémunérés par aucun parti.

Anniversaire

Un mois après son lancement, Tamarod a déjà réuni plus de 7 millions de paraphes. Mi-juin, ses membres annoncent le nombre final de signataires : quelque 22 millions. Alors qu’eux-mêmes n’y croyaient pas sérieusement, ils réalisent que le départ de Mohamed Morsi devient envisageable. De grandes manifestations sont programmées pour le 30 juin, jour anniversaire de la prise de fonctions du président.

Tamarod entre alors dans la phase la plus critique de sa courte histoire. Alors que ses militants revendiquaient le caractère pacifique de la campagne, les événements qu’elle a déclenchés ont vu le sang couler, notamment avec le décès, le 8 juillet, de plus de 50 manifestants islamistes tués par l’armée. Une responsabilité que Mohamed Abdel-Aziz, l’un des membres fondateurs, rejette sur les islamistes, qu’il qualifie de « terroristes ».

la suite après cette publicité

Après avoir bien accueilli l’intervention de l’armée, les jeunes militants ont dénoncé la déclaration constitutionnelle publiée par Adly Mansour, le président par intérim. Dépassés ? Pour les membres de Tamarod, dont certains nourrissent désormais des ambitions politiques, le plus difficile ne fait sans doute que commencer.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires