Maroc : Moha Ouali Tagma, « Monsieur Afrique » du royaume
Diplomate chevronné, le nouveau « Monsieur Afrique » du Maroc, Moha Ouali Tagma s’est vu confier une feuille de route aussi simple qu’ambitieuse.
Les murs de son bureau sont ornés de photos du roi Hassan II posant avec Omar Bongo Ondimba et Abdou Diouf et de celles de son successeur, Mohammed VI, avec Ali Bongo Ondimba et Abdoulaye Wade. Un héritage que Moha Ouali Tagma entend faire fructifier. Nommé en mars directeur des affaires africaines, il s’est d’ailleurs vu confier une feuille de route aussi simple qu’ambitieuse. « L’Afrique est une priorité pour le Maroc », lui a indiqué son ministre de tutelle, Saadeddine El Othmani, avant qu’il ne rejoigne le siège du ministère des Affaires étrangères et de la Coopération, avenue Franklin-Roosevelt à Rabat.
Ce diplomate chevronné, qui a roulé sa bosse durant trente ans en Afrique et en Europe, peut s’appuyer sur une équipe de 30 cadres et un réseau de 18 ambassades au sud du Sahara. Depuis son arrivée, son staff n’a pas eu de répit. Ouali Tagma a d’abord participé à la préparation du périple de Mohammed VI, qu’il a accompagné fin mars au Sénégal, en Côte d’Ivoire et au Gabon. Il s’est ensuite rendu en mai à Addis-Abeba pour rencontrer les délégations présentes en marge du cinquantenaire de l’Union africaine (UA), puis est retourné à Dakar pour la commission mixte de coopération sénégalo-marocaine. Il devrait enchaîner sur plusieurs voyages en Afrique de l’Ouest (Mali, Niger, Côte d’Ivoire) au mois de juillet. Au menu des discussions : les relations bilatérales, la question du Sahara, le règlement de la crise malienne. Et, bien sûr, la coopération économique, les investissements, l’implantation des entreprises marocaines. « L’Afrique est le continent qui va tirer la croissance mondiale dans les prochaines décennies, insiste-t-il. Là-bas se joue une partie de notre avenir. »
Éducation francophile
Né en 1954 à Aïn Leuh, petit village du Moyen-Atlas, Ouali Tagma est issu d’une tribu berbère. Son père, militaire, a participé aux campagnes de libération de l’Europe occupée par l’Allemagne nazie (Corse, île d’Elbe, Provence, Alsace…). Le jeune Moha est élevé dans l’idéal de la liberté nourri des récits de la Seconde Guerre mondiale. Il fréquente le très réputé collège d’Azrou. Il y reçoit une éducation francophile dans un établissement créé par les Français pour fournir au royaume ses généraux, préfets et autres grands commis de l’État. Puis il décroche une licence en sciences politiques à l’université de Fès, avant de rejoindre l’École nationale d’administration de Rabat (ENA).
De solides diplômes qui lui permettent d’intégrer le ministère des Affaires étrangères en 1981. Après deux années passées au siège, il est nommé chef d’un nouveau bureau à Malabo. Le président Obiang Nguema a chassé du pouvoir son oncle, le sanguinaire Macías Nguema, et quitté le giron soviétique pour se rapprocher de la France. Le royaume, allié des Occidentaux, assure sa garde présidentielle et détache un contingent militaire pour assurer la stabilité du pays.
Promu quatre ans plus tard chargé d’affaires au Gabon, Moha Ouali Tagma est accueilli à bras ouverts par Omar Bongo Ondimba, qui entretient des relations étroites avec son « frère » Hassan II. Les deux chefs d’État collaborent militairement et politiquement avec les Français dans le pré carré francophone. En 1989, il rejoint la mission permanente du Maroc à Genève afin de préparer la conférence de Marrakech, qui a lieu en 1994 et qui aboutit peu après à la création de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), et négocie l’adhésion du Maroc.
Cinq années à Dakar
Après un retour au siège à Rabat, il fait ses valises en 2003 pour Dakar. Mohammed VI a succédé à Hassan II et multiplie les voyages au sud du Sahara. L’ambassadeur l’accueille cinq fois au Sénégal. M6 et le président Abdoulaye Wade nouent un partenariat d’exception dont Air Sénégal International, filiale de la Royal Air Maroc, est l’une des concrétisations phares. En remerciement pour ses bons et loyaux services, le président sénégalais et son épouse offriront à Moha Ouali Tagma un dîner d’adieu à leur domicile particulier. En 2008, il est nommé à l’ambassade de Varsovie, où il cherchera à développer les relations entre le royaume et les pays de l’Est et à sensibiliser les frères Kaczynski, alors au pouvoir, au dossier de l’Union pour la Méditerranée. Pour Moha l’Africain, le dialogue entre Européens et Nord-Africains dans le cadre de cette union ne peut que profiter au Sahel et à l’Afrique subsaharienne sur les plans économique et sécuritaire.
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