Touche pas à ma citrouille !
Aujourd’hui, on va parler d’un scandale de proportions bibliques, ou presque, qui concerne la province marocaine des Doukkala. Plus précisément, on va parler de la plus belle production des Doukkala. Il ne s’agit pas de la femme du boulanger ni de la fille du facteur, non, il s’agit de la citrouille.
Oui, vous avez bien lu : la citrouille. Et cessez de ricaner, car il s’agit d’une grave affaire.
Or donc, pour ceux qui l’ignorent, la citrouille des Doukkala est la meilleure au monde. Un couscous sans cette merveille ne mérite pas le nom de couscous. Depuis des temps immémoriaux, en tout cas depuis avant même le protectorat français, on cultivait ce beau fruit – car, vous le savez, il s’agit d’un fruit et non d’un légume.
Mais – horreur et damnation -, depuis quelques années, des agriculteurs du coin ont commencé à introduire d’autres espèces que l’espèce traditionnelle, qui est grande, orange et succulente. Vendant leur âme au diable, ils introduisent des espèces venant de chez l’Oncle Sam. Si vous ne voyez pas où cela nous mène, laissez-moi éclairer votre citrouille, ou plutôt votre lanterne.
Le jour où toutes nos citrouilles seront devenues américaines, qui pourra les empêcher de réclamer une fin digne d’elles, c’est-à-dire de finir en citrouille de Halloween ? Ce n’est pas la peine de dénoncer nos sorcières et nos voyantes comme un signe d’arriération si c’est pour introduire Halloween et les j’noun américains dans notre culture. Halloween, cette espèce de fête yankee à base de niaiserie généralisée et de déguisements terrifiants, a envahi la vieille Europe. Faut-il que nous autres Maghrébins, nous nous livrions pieds et poings liés à ces sottises ? Et d’ailleurs, elle est halal, la cucurbitacée américaine ? Qu’en pensent les oulémas ?
De plus, qui nous dit que ces citrouilles venues d’ailleurs ne se transformeront pas en carrosse à minuit pour f… le camp à travers champs ? C’est bien la peine d’avoir investi de l’argent et de l’énergie pour voir le fruit de son travail disparaître au galop, à l’horizon, dès minuit ? En tout cas, ça n’arrivait jamais avec notre bonne vieille citrouille des Doukkala.
Au nom de tous les émigrés qui rentrent au pays et découvrent des changements aussi traumatisants, je proteste ! Nous voulons que le pays reste ce qu’il est dans nos souvenirs. C’est ce qui nous aide à supporter l’exil. Quand nous revenons dans les Doukkala, nous voulons voir nos bonnes vieilles citrouilles arabo-berbères et non des potimarrons efféminés qui n’entendent que la langue de Shakespeare. Je lance donc sur cette page un appel aux Maghrébins dignes de ce nom pour qu’ils se constituent en Association pour la sauvegarde de l’authentique citrouille des Doukkala. Ne nous laissons pas faire ! Aujourd’hui la citrouille, demain les dattes, après-demain les pastèques ? C’est l’américanisation par l’estomac !
C’est décidé, je me lance dans une grève de la faim, que je n’arrêterai que si on me sert un couscous à la citrouille des Doukkala. La vraie, pas celle qui a envahi l’Irak et l’Afghanistan.
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