Congo : un consensus et des questions
Un large accord a été trouvé sur le report sine die des élections locales. Le temps de réviser les listes, d’instaurer une carte électorale biométrique et, surtout, de remobiliser les électeurs.
Congo : l’âge de la sagesse
La controverse entre le gouvernement et la frange radicale de l’opposition est loin d’être terminée. Elle a même pris de l’ampleur lorsque le premier a organisé, du 23 au 26 mars, à Dolisie, une concertation politique nationale à laquelle ont participé quelque 400 représentants des partis politiques, de la société civile, des confessions religieuses, ainsi que des diplomates. Les débats ont notamment porté sur le report des élections locales et la « méthodologie de détermination du corps électoral », c’est-à-dire une nouvelle révision des listes électorales (la dernière avait eu lieu l’an dernier, avant les législatives) et l’organisation préalable d’un recensement administratif spécial.
Un consensus s’est dégagé sur tous les points : la révision du fichier électoral – et, en attendant qu’elle soit effective, le report, sine die, du scrutin local -, la transformation de la Commission nationale d’organisation des élections (Conel) en un organe permanent indépendant doté d’une autonomie administrative et financière, l’établissement de cartes d’électeur biométriques avec photo, ainsi que l’introduction progressive dans la législation de l’usage du bulletin unique. Pour Bonaventure Mbaya, de la Convergence citoyenne (opposition), il s’agit d’une victoire, parce que le pouvoir a accepté de tenir compte de « ces questions essentielles, qui doivent permettre l’organisation d’élections libres et transparentes ». Mais la lutte n’est pas encore terminée, modère-t-il : « Nous avons gagné sur le papier à Dolisie, il faut désormais que cela devienne effectif. »
Outre le renouvellement des élus locaux (quelque 560 conseillers départementaux et 860 conseillers municipaux, qui auront à élire les maires des communes, les présidents des conseils départementaux et, en tant que grands électeurs, les sénateurs), le principal enjeu de ces prochains scrutins et de la modernisation qui va donc les précéder sera de remobiliser les 2 millions d’électeurs congolais. Les locales de juin 2008 et les législatives de juillet-août 2012 ont en effet été marquées par des taux d’abstention particulièrement élevés, de plus de 70 % (contre 30,6 % lors de la présidentielle de 2009).
De son côté, le Collectif des partis de l’opposition congolaise, qui regroupe treize formations de l’opposition dite radicale, ne s’est pas rendu à Dolisie et a rejeté en bloc les conclusions de la rencontre. Estimant qu’outre les questions relatives au code électoral et à l’organisation des scrutins il était indispensable de débattre des maux qui, selon lui, gangrènent le pays, le collectif continue d’exiger avant toute chose que le président de la République convoque des « états généraux de la nation ».
Explosion
Un credo auquel refuse d’obéir la majorité présidentielle, qui estime qu’il n’y a pas lieu de le faire et que le pays n’est pas en crise. Selon Pierre Ngolo, le secrétaire général du Parti congolais du travail (PCT, au pouvoir), « le radicalisme de certains, qui ne reconnaissent rien de ce qui est entrepris, peut conduire le Congo à l’explosion. Les Congolais devraient se détourner de cette voie ». Quant aux accusations de fraude électorale que les détracteurs du parti majoritaire formulent à son encontre, Pierre Ngolo répond que « le PCT gagne là où il le mérite et, là où il doit échouer, il échoue. Malheureusement, il est une opinion forte qui laisse penser qu’il serait un parti fraudeur. Mais le PCT n’a pas peur de la transparence, bien au contraire : il se bat pour la transparence, la bonne gouvernance et la démocratie ».
Une majorité très marquée
Les élections locales de juin 2008 ont été largement remportées par le Parti congolais du travail (PCT) et ses alliés du Rassemblement de la majorité présidentielle (RMP), qui ont obtenu plus de 80 % des sièges au sein des conseils départementaux et communaux. Lors des législatives de juillet-août 2012, le PCT et ses alliés ont obtenu 117 sièges sur 139 à l’Assemblée nationale (dont 89 pour le PCT), seuls 12 ayant été remportés par des indépendants et 7 par le principal parti d’opposition, l’Union panafricaine pour la démocratie sociale (Upads, de l’ancien président Pascal Lissouba), qui dispose par ailleurs de 4 sièges sur 72 au Sénat. Cécile Manciaux
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